7. Ébauche de thèses pour la résolution sur les soviets

La septième conférence de Russie du P.O.S.D.(b) R.
(Conférence d’avril), 24-29 avril (7-12 mai) 1917

Lénine

7. Ébauche de thèses pour la résolution sur les soviets

   Le rôle des soviets s’est révélé particulièrement important dans une série de centres locaux, et surtout dans les centres ouvriers. Un pouvoir unique s’y est créé ; la bourgeoisie a été entièrement désarmée et réduite à une complète obéissance ; les salaires sont augmentés ; une journée de travail réduite sans que la production ait diminué ; le ravitaillement est assuré ; un contrôle commence à être exercé sur la production et la répartition ; toutes les anciennes autorités sont destituées ; l’initiative révolutionnaire des paysans est encouragée dans la question du pouvoir (révocation de toutes les anciennes autorités et création d’autorités nouvelles), ainsi que dans celle de la terre.

   Dans la capitale et dans certains grands centres, on observe le phénomène inverse : la composition des soviets est moins prolétarienne ; les Comité exécutifs y sont infiniment plus influencés par les éléments petits-bourgeois et la « collaboration avec la bourgeoisie » y est plus largement pratiquée, notamment dans les commissions, ce qui entrave l’initiative révolutionnaire des masses, bureaucratise le mouvement révolutionnaire des masses et leurs tâches révolutionnaires, freine l’application de toutes les mesures révolutionnaires susceptibles de « heurter » les capitalistes.

   Il est tout à fait naturel et inévitable qu’après l’intense déploiement d’énergie révolutionnaire dans la capitale, où le peuple, et surtout les ouvriers, a consenti les plus lourds sacrifices pour renverser le tsarisme, dans la capitale où le pouvoir central de l’État a été renversé et où le pouvoir le plus centralisé du capital a donné le maximum de pouvoir aux capitalistes, il est naturel que le pouvoir des soviets (et le pouvoir du prolétariat) s’y soit révélé faible, que le développement ultérieur de la révolution y soit apparu particulièrement difficile, le passage à la nouvelle étape de la révolution particulièrement pénible, la résistance de la bourgeoisie plus forte que partout ailleurs.

   D’où cette conclusion : alors que, dans les capitales et dans les plus grands centres, les principaux efforts doivent porter sur la préparation des forces en vue de mener jusqu’au bout la deuxième étape de la révolution, on peut et on doit, sur le plan local, faire faire immédiatement à la révolution un pas en avant en instaurant le pouvoir unique des soviets des députés ouvriers, en stimulant l’énergie révolutionnaire des masses ouvrières et paysannes, en passant au contrôle de la production et de la répartition des produits, etc.

   Voici comment se dessine le développement de la révolution :

  1. élimination de l’ancien pouvoir au centre ;
  2. prise du pouvoir par la bourgeoisie, en raison du manque de préparation du prolétariat aux immenses tâches de l’État ;
  3. extension de la révolution aux provinces ;
  4. à l’échelon local, surtout dans les centres prolétariens, création de nombreuses communes et développement de l’énergie révolutionnaire des masses ;
  5. la terre, on la confisque, etc. ;
  6. les usines, on les contrôle ;
  7. unité du pouvoir ;
  8. la révolution locale, municipale, progresse ;
  9. bureaucratisation et soumission à la bourgeoisie au centre.

   Conclusions :

  1. préparation au centre (préparation des forces en vue d’une nouvelle révolution) ;
  2. faire avancer la révolution (pouvoir ? terre ? usines ?) en province ;
  3. créer localement des communes, c’est- à-dire complète autonomie locale ; pleine initiative ; sans police, sans corps de fonctionnaires, pouvoir sans partage des ouvriers et des masses paysannes en armes ;
  4. lutte contre l’influence des éléments petits-bourgeois, qui poussent à la bureaucratisation et, comme la bourgeoisie, s’attachent à tranquilliser les masses ;
  5. rassembler les expériences locales pour stimuler le centre : la province prêche l’exemple.
  6. faire comprendre aux masses d’ouvriers, de paysans et de soldats que les succès de la révolution à l’échelon local sont dus à l’unité du pouvoir et à la dictature du prolétariat.
  7. naturellement, les choses sont plus difficiles au centre et demandent plus de temps.
  8. développement de la révolution par communes formées dans les faubourgs et les quartiers des grandes villes…
  9. transformation (dans les capitales, etc.) en « valets de la bourgeoisie ».

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