Questions posées aux délégués du congrès général de l’armée pour la démobilisation

Questions posées aux délégués du congrès général de l’armée pour la démobilisation

Lénine

   Ecrit le 17 (30) décembre 1917. Paru pour la première fois en 1927, dans les « Notes de l’Institut Lénine » II.

   1) L’éventualité d’une offensive allemande dans un proche avenir est-elle probable ou non ?

   a) du point de vue des ressources en hommes et en matériel pour une offensive d’hiver ;

   b) sous l’angle du moral de la masse des soldats allemands ; ce moral est-il susceptible d’empêcher l’offensive ou tout au moins de la retarder ?

   2) Peut-on présumer que les Allemands, au cas où nous romprions immédiatement les pourparlers de paix, où leurs troupes passeraient aussitôt à l’offensive, soient capables de nous infliger une défaite décisive ? Sont-ils à même de s’emparer de Pétrograd ?

   3) Y a-t-il lieu de craindre que la nouvelle d’une rupture des négociations de paix provoque dans le gros de l’armée l’anarchie et la désertion, ou peut-on être assuré que l’armée tiendra fermement le front, même après une telle nouvelle ?

   4) Notre armée est-elle assez forte pour résister à l’offensive allemande, si celle-ci est déclenchée le 1er janvier ? Au cas contraire, dans combien de temps notre armée pourrait-elle opposer une résistance à l’offensive allemande ?

   5) En cas d’offensive allemande brusquée, notre armée pourrait-elle se replier en bon ordre en sauvant l’artillerie ? Dans l’affirmative, serait-il possible à cette condition de retarder pour longtemps l’avance des Allemands à l’intérieur de la Russie ?

   6) Conclusion générale : du point de vue de l’état de l’armée, convient-il de nous efforcer de faire traîner les pourparlers de paix, ou bien la rupture immédiate et brutale, dans un esprit révolutionnaire, en raison de la politique annexionniste des Allemands, est-elle préférable, afin de préparer résolument le terrain en vue d’une guerre révolutionnaire ?

   7) Convient-il d’entreprendre immédiatement un travail d’agitation intense contre la politique annexionniste des Allemands et en faveur d’une guerre révolutionnaire ?

   8) Est-il possible de procéder dans un délai très bref (5 à 10 jours par exemple) à une consultation de nombreuses unités de l’armée de campagne afin d’obtenir des réponses plus complètes, sous une forme mieux appropriée, aux questions posées ci-dessus ?

   9) Peut-on espérer que le désaccord avec les Ukrainiens s’atténuera et qu’il fera même place à une union étroite, dès que la nouvelle de la politique annexionniste des Allemands sera connue, ou bien faut-il s’attendre à voir les Ukrainiens profiter de l’aggravation de la situation des Grands-Russes pour accentuer leur lutte contre ces derniers ?

   10) Si l’armée pouvait voter, se prononcerait-elle en faveur d’une paix immédiate avec annexions (perte de toutes les régions occupées) et à des conditions économiques extrêmement pénibles pour la Russie, ou bien en faveur d’une tension extrême des forces en vue d’une guerre révolutionnaire, c’est-à-dire pour la riposte aux Allemands ?

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