Mobiliser les masses contre l’impérialisme

Sur la médecine révolutionnaire

Guevara

   Nous devons nous rappeler de cela à chaque instant : nous sommes dans une guerre, une guerre froide comme ils l’appellent ; une guerre où il n’y a pas de ligne de front, de bombardement continu, mais où il y a deux adversaires – ce petit combattant des Caraïbes et l’immense hyène impérialiste – qui sont face à face et savent que l’un des deux mourra au combat.

   Les nord-Américains sont conscients, ils sont bien conscients, compañeros, que la victoire de la Révolution Cubaine ne sera pas seulement une simple défaite pour l’empire, ni un chaînon supplémentaire dans la longue série de défaites que sa politique de contrainte et d’oppression contre les peuples a entraîné dans les dernières années. La victoire de la Révolution Cubaine sera une démonstration tangible devant toutes les Amériques que les peuples sont capables de se soulever, qu’ils peuvent s’élever par eux-mêmes, juste en dessous des crocs de la bête immonde.  Cela signifie le début de la fin de la domination coloniale en Amérique, à savoir, le début décisif de la fin pour l’impérialisme nord-Américain.

   C’est pour cela que les impérialistes ne cèdent pas eux-mêmes, parce que c’est une lutte à mort. C’est pour cela que nous ne pouvons pas faire un pas en arrière. Parce que dès la première fois où nous reculerons, cela signifierait le début d’une longue série pour nous aussi, et cela se finirait de la même façon qu’avec tous ces faux chefs et avec tous ces gens qui, à un moment précis de l’histoire, n’ont pas été à la hauteur de la tâche qu’est la résistance à l’empire.

   C’est pourquoi nous devons aller de l’avant, en attaquant sans répit l’impérialisme. Du monde entier nous devons apprendre les leçons que les événements offrent. Le meurtre de Lumumba devrait être une leçon pour nous tous.

   Le meurtre de Patrice Lumumba est un exemple de ce que l’empire est capable lorsque la lutte contre lui est dirigée d’une manière ferme et soutenue. L’impérialisme doit être frappé au museau, encore, puis encore, dans une succession infinie de coups et de contre-coups. C’est par cette seule manière que les peuples pourront remporter leur indépendance complète.

   Jamais un pas en arrière, jamais un moment de faiblesse ! Et chaque fois que les circonstances laissent à penser que la situation sera peut-être meilleure si nous ne nous battions plus contre l’empire, chacun d’entre doit se rappeler de la longue série de tortures et de morts au travers desquelles le peuple cubain a du passer pour gagner son indépendance. Chacun doit se rappeler de l’éviction des paysans, du meurtre des ouvriers, des grèves brisées par la police, et de toutes ces oppressions de classe qui ont aujourd’hui totalement disparu de Cuba… et, plus encore, nous devons bien comprendre comment la victoire est remportée en préparant les peuples, en soulignant leur conscience révolutionnaire dans une unité établie, en confrontant chaque tentative d’aggression avec nos fusils en avant. C’est comme ça que l’on gagne.

   Nous devons nous rappeler cela, j’insiste encore et encore sur ce fait : la vitoire du peuple cubain ne peut pas seulement provenir d’une aide extérieure, aussi suffisante et généreuse soit-elle, aussi forte et importante la solidarité des peuples du monde soit-elle. Parce que même avec cette soilidarité abondante des peuples du monde avec Patrice Lumumba et le peuple congolais, lorsque les conditions dans le pays sont manquantes, lorsque les chefs d’État ont échoué à comprendre comment riposter sans merci à l’impérialisme, lorsqu’ils font un pas en arrière, ils perdent la lutte. Et ils ne la perdent pas seulement pour quelques années, mais pour qui sait combien d’années ! Ce serait un grand revers pour tous les peuples.

   C’est de cela dont nous devons être bien conscients, que la victoire de Cuba ne repose pas dans les roquettes soviétiques, ni dans la solidarité du monde socialiste, ni dans la solidarité du monde entier. La victoire de Cuba repose dans l’unité, le travail, et l’esprit de sacrifice de son peuple.

Discours de Che Guevara, 28 mars 1961 à Santa Clara
Traduit du castillan par Antoine Monchaux

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