Pour saluer le nouvel essor de la révolution chinoise

Pour saluer le nouvel essor de la révolution chinoise((Directive à l’intention du Parti, rédigée par le camarade Mao Zedong au nom du Comité central du Parti communiste chinois.))

Mao Zedong

1er février 1947

1. Toutes les circonstances montrent que la situation en Chine va entrer dans une nouvelle étape de son développement. Cette nouvelle étape sera celle d’une nouvelle grande révolution populaire, aboutissement de la lutte anti-impérialiste et antiféodale à l’échelle nationale. Nous sommes à la veille de cette révolution. La tâche du Parti est de hâter l’essor de la révolution et sa victoire.

2. La situation militaire évolue d’ores et déjà dans un sens favorable au peuple. En sept mois de combats, de juillet dernier à janvier de cette année, nous avons anéanti 56 brigades des forces régulières de Tchiang Kaï-chek qui ont pénétré dans les régions libérées, soit une moyenne mensuelle de 8 brigades, sans compter les nombreuses troupes fantoches et les corps de sécurité publique qui ont été détruits, ni les autres forces régulières de Tchiang Kaï-chek qui ont été mises en déroute. L’offensive de Tchiang Kaï-chek continue dans le Chantong du Sud et de l’Ouest, dans la région frontière du Chensi-Kansou-Ninghsia, le long de la section septentrionale de la voie ferrée Peiping-Hankeou et dans la Mandchourie méridionale, cependant elle est devenue beaucoup plus faible qu’elle ne l’était l’automne dernier. Tchiang Kaï-chek n’a plus assez de troupes à sa disposition et n’arrive pas à atteindre les effectifs prescrits pour la conscription; voilà qui est sérieusement en contradiction avec ses lignes de front étirées et ses énormes pertes en effectifs. Le moral de son armée baisse chaque jour davantage. Durant les récents combats dans le Kiangsou du Nord, le Chantong du Sud et de l’Ouest et le Chansi de l’Ouest, le moral de beaucoup de ses troupes est tombé à un niveau très bas. Sur plusieurs fronts, nos armées commencent à prendre l’initiative, et les armées de Tchiang Kaï-chek à la perdre. Il est à prévoir que, dans les quelques mois à venir, nous pourrons atteindre l’objectif d’anéantir au total 1oo brigades de Tchiang Kaï-chek, en comptant celles que nous avons déjà détruites. Tchiang Kaï-chek dispose en tout de 93 divisions (corps d’armée) d’infanterie et de cavalerie régulières, composées de 248 brigades (divisions), totalisant 1.916.000 hommes, sans compter les troupes fantoches, la police, les corps locaux de sécurité publique, les corps de la police des communications, les services de l’Intendance et les armes techniques. Les forces engagées dans l’attaque des régions libérées comptent 78 divisions (corps d’armée), composées de 218 brigades (divisions), totalisant 1.713.000 hommes, soit environ 90 pour cent des troupes régulières de Tchiang Kaï-chek. Il ne reste dans les régions de l’arrière contrôlées par Tchiang Kaï-chek que 15 divisions, soit 30 brigades, se montant à 203.000 hommes, c’est-à-dire environ10 pour cent du total. Par conséquent, Tchiang Kaï-chek ne peut plus envoyer de l’arrière d’importantes troupes d’une bonne capacité de combat pour attaquer les régions libérées. Parmi les 218 brigades engagées dans l’attaque des régions libérées, plus d’un quart ont été anéanties. Bien que quelques-unes aient pu compléter leurs effectifs et se reconstituer sous leurs désignations primitives après avoir été anéanties, leur capacité de combat est très faible. D’autres, une fois complétées, ont été à nouveau détruites, alors que d’autres encore n’ont même pas pu effectuer leur complétement. Si nos armées peuvent anéantir encore 40 à 50 brigades au cours des quelques mois à venir et qu’elles en aient ainsi détruit au total 100 environ, y compris les précédentes, il se produira un important changement dans la situation militaire.

3. Pendant ce temps, un grand mouvement populaire se développe dans les régions de Tchiang Kaï-chek. Les émeutes populaires à Changhaï((A partir d’août 1946, les autorités du Kuomintang de Changhaï interdirent aux marchands étalagistes des quartiers de Houangpou et de Laotcha de poursuivre leur commerce. Dans la dernière décade de novembre, près de mille d’entre eux qui avaient continué la vente avaient été arrêtés. Le 30 novembre, trois mille marchands étalagistes manifestèrent et cernèrent le commissariat de police du quartier de Houangpou. Les autorités du Kuomintang donnèrent l’ordre de tirer; sept manifestants furent tués et nombre d’autres blessés ou arrêtés. Le 1er décembre, les marchands étalagistes continuèrent leur lutte. Bien qu’il y eût dix nouveaux tués et plus d’une centaine de blessés, le nombre de participants passa à plus de cinq mille. Tous les magasins de Changhaï fermèrent pour marquer leur sympathie aux manifestants. L’incident prit alors les proportions d’un mouvement de masse contre Tchiang Kaï-chek, mouvement qui s’étendit à toute la ville.)), qui ont commencé le 30 novembre de l’an dernier à la suite de la persécution des marchands étalagistes par le Kuomintang, et le mouvement des étudiants à Peiping, qui a commencé le 30 décembre dernier à la suite du viol d’une étudiante chinoise par des soldats américains((Cet incident se produisit à Peiping le 24 décembre 1946. Une étudiante de l’Université de Pékin fut violée par des soldats américains. A la suite de cela, dans plusieurs dizaines de villes grandes et moyennes des régions de Tchiang Kaï-chek, les étudiants organisèrent, à partir du 30 décembre et durant tout le mois de janvier 1947, des grèves et des manifestations contre les Etats-Unis et Tchiang Kaï-chek, demandant le retrait des troupes américaines de Chine. Plus d’un demi-million d’étudiants prirent part à ce mouvement.)), marquent une nouvelle poussée des luttes populaires dans les régions contrôlées par Tchiang Kaï-chek. Le mouvement des étudiants qui a commencé à Peiping s’est étendu aux autres grandes villes du pays, avec des centaines de milliers de participants;il a dépassé en ampleur le Mouvement des étudiants du 9 Décembre contre l’impérialisme japonais((L’année 1935 marqua le début d’un nouvel essor du mouvement patriotique du peuple chinois. Les étudiants de Pékin, sous la direction du Parti communiste chinois, organisèrent, les premiers, une manifestation patriotique le 9 décembre, en lançant des mots d’ordre tels que “Arrêter la guerre civile et tous unis contre l’ennemi extérieur!”, “A bas l’impérialisme japonais!”. Ce mouvement fit une brèche dans le régime de terreur instauré depuis longtemps par le gouvernement du Kuomintang entré en collusion avec l’envahisseur japonais, et gagna bientôt l’appui du peuple tout entier. C’est ce qu’on a appelé le “Mouvement du 9 Décembre”. A partir de ce moment, de nouveaux changements se manifestèrent avec évidence dans les rapports entre les différentes classes du pays. La formation d’un front uni national contre le Japon, préconisée par le Parti communiste chinois, constitua dès lors la politique réclamée ouvertement par tous les patriotes, alors que la politique de trahison du gouvernement de Tchiang Kaï-chek devenait des plus impopulaires.)).

4. Les victoires de l’Armée populaire de Libération dans les régions libérées et le développement du mouvement populaire dans les régions de Tchiang Kaï-chek présagent l’approche certaine d’une nouvelle grande révolution populaire anti-impérialiste et antiféodale, capable de triompher.

5. Cette situation se présente dans les circonstances où l’impérialisme américain et son valet Tchiang Kaï-chek ont remplacé l’impérialisme japonais et son valet Wang Tsing-wei et ont adopté la politique visant à faire de la Chine une colonie des Etats-Unis, à déclencher une guerre civile et à renforcer la dictature fasciste. Face à cette politique réactionnaire de l’impérialisme américain et de Tchiang Kaï-chek, le peuple chinois n’avait pas d’autre issue que la lutte. Lutter pour l’indépendance, la paix et la démocratie, telle est encore, dans la période actuelle, l’exigence fondamentale du peuple chinois. Déjà en avril 1945, prévoyant la mise en œuvre par l’impérialisme américain et Tchiang Kaï-chek de cette politique réactionnaire, le VIIe Congrès de notre Parti avait formulé une ligne politique complète et entièrement juste pour en triompher.

6. Cette politique réactionnaire de l’impérialisme américain et de Tchiang Kaï-chek a forcé toutes les couches populaires de Chine à s’unir pour leur propre salut. Elles comprennent les ouvriers, les paysans, la petite bourgeoisie urbaine, la bourgeoisie nationale, les hobereaux éclairés, les autres patriotes, les minorités nationales et les Chinois d’outre-mer. C’est un front uni extrêmement large englobant toute la nation. Comparé au front uni de la période de la Guerre de Résistance contre le Japon, il a non seulement une envergure tout aussi large, mais même des bases encore plus profondes. Tous les camarades du Parti doivent lutter pour consolider et développer ce front uni. Dans les régions libérées, tout en appliquant résolument, sans hésitation aucune, la politique de la terre à ceux qui la travaillent, on maintiendra celle du “système des trois tiers”((Le “système des trois tiers” représentait la politique du front uni du Parti communiste chinois concernant la constitution des organes du pouvoir dans les régions libérées, pendant la Guerre de Résistance contre le Japon. Selon cette politique, les organes du pouvoir démocratique antijaponais se composaient de membres du Parti communiste, de progressistes de gauche et d’éléments du centre ou autres, dans la proportion d’environ un tiers pour chaque groupe.)). En plus des communistes, nous devons continuer à faire participer aux organes du pouvoir et aux organisations sociales les progressistes hors Parti et les éléments du centre (tels les hobereaux éclairés) qui sont fort nombreux. Dans les régions libérées, tous les citoyens, sans distinction de classe, de sexe ou de croyance, ont le droit d’élire et d’être élus, à l’exception des traîtres et des réactionnaires qui ont travaillé contre les intérêts du peuple et encouru sa haine implacable. Quand le système de la terre à ceux qui la travaillent aura été complètement appliqué, le droit à la propriété privée continuera à être garanti au peuple dans les régions libérées.

7. Parce que le gouvernement de Tchiang Kaï-chek poursuit de longue date une politique financière et économique réactionnaire et parce que le capital bureaucratique-comprador de Tchiang Kaï-chek((Voir “La Situation actuelle et nos tâches”, section VI, pp. 172-175 du présent tome.)) s’est associé avec le capital impérialiste des Etats-Unis dans ce fameux accord de trahison nationale qu’est le Traité de Commerce sino-américain((Le “Traité de Commerce sino-américain”, c’est-à-dire le “Traité sino-américain d’Amitié, de Commerce et de Navigation”, fut conclu le 4 novembre 1946 à Nankin entre le gouvernement de Tchiang Kaï-chek et le gouvernement des Etats-Unis. Ce traité, qui aliénait au profit des Etats-Unis une grande partie de la souveraineté de la Chine, comporte trente articles, dont le contenu principal est le suivant:
1) Les ressortissants des Etats-Unis jouiront, dans “toute l’étendue . . . des territoires” de la Chine, des droits de résider, de voyager, de poursuivre des activités dans les domaines du commerce, de la fabrication, de l’industrie de transformation, des sciences, de l’éducation, de la religion et de la philanthropie, ainsi que de prospecter et d’exploiter les ressources minières, de prendre à bail et de posséder des terres, et d’exercer d’autres métiers et professions. Sous le rapport des droits économiques, les ressortissants des Etats-Unis bénéficieront du même traitement que les Chinois.
2) Les produits américains bénéficieront en Chine, dans les domaines des impôts et taxes, de la vente, de la distribution et de l’utilisation, de conditions au moins aussi favorables que celles qui sont accordées aux produits de n’importe quel tiers pays ou aux produits chinois. “Aucune interdiction ni restriction ne sera imposée” par la Chine aux importations de plantes cultivées, de produits, ou d’articles fabriqués en provenance des Etats-Unis, ni à l’exportation vers les Etats-Unis de tout produit ou article chinois.
3) Les navires américains auront la liberté d’accès à tous les ports, lieux et eaux territoriales de la Chine ouverts à la navigation ou au commerce étrangers; leurs équipages et leur fret jouiront de la liberté de transit sur le sol chinois “par les voies les plus commodes”. Sous prétexte du “premier appel de détresse”, les navires américains, y compris les vaisseaux de guerre, peuvent entrer dans “tous les ports, lieux et eaux territoriales” de la Chine qui “ne sont pas ouverts à la navigation ou au commerce étrangers”.
Wellington Koo, alors ambassadeur du gouvernement de Tchiang Kaï-chek aux Etats-Unis, eut le cynisme de déclarer publiquement que ce traité signifiait “l’ouverture de tout le territoire chinois aux commerçants des Etats-Unis”.)), une dangereuse inflation se développe rapidement; l’industrie et le commerce de la bourgeoisie nationale de Chine vont toujours plus à la faillite; la situation des masses laborieuses, des fonctionnaires et des enseignants empire de jour en jour; les nombreux éléments de la classe moyenne voient fondre leurs économies jusqu’à perdre tous leurs biens; aussi des grèves d’ouvriers et d’étudiants et d’autres luttes éclatent-elles sans cesse. Une crise économique d’une gravité sans précédent menace en Chine toutes les couches de la population. Pour pouvoir continuer la guerre civile, Tchiang Kaï-chek a rétabli son pernicieux système de conscription et d’imposition en grain de la période de la Guerre de Résistance; la vie est ainsi devenue impossible pour l’immense masse de la population rurale, en particulier pour les paysans frappés de misère; aussi des émeutes populaires ont-elles déjà commencé et elles continueront de s’étendre. Par conséquent, la clique réactionnaire régnante de Tchiang Kaï-chek se discréditera de plus en plus aux yeux des larges masses du peuple et se trouvera aux prises avec de graves crises politiques et militaires. D’un côté, la situation fait chaque jour progresser le mouvement populaire anti-impérialiste et antiféodal dans les régions contrôlées par Tchiang Kaï-chek; de l’autre, elle démoralise de plus en plus les troupes de Tchiang Kaï-chek et accroît les possibilités de victoire pour l’Armée populaire de Libération.

8. L’Assemblée nationale illégale, facteur de division, et que Tchiang Kaï-chek a convoquée afin d’isoler notre Parti et les autres forces démocratiques, de même que la pseudo-Constitution qu’elle a fabriquée, ne jouissent d’aucun crédit auprès du peuple. Au lieu d’isoler notre Parti et les autres forces démocratiques, elles ont isolé la clique réactionnaire régnante de Tchiang Kaï-chek elle-même. Notre Parti et les autres forces démocratiques ont refusé de participer à la pseudo-Assemblée nationale, c’était là une politique parfaitement juste. La clique réactionnaire régnante de Tchiang Kaï-chek a attiré vers elle le Parti de la Jeunesse((Nom abrégé du “Parti de la Jeunesse de Chine”, appelé encore Parti étatiste, lui-même issu de la “Ligue de la Jeunesse étatiste de Chine”. Ce parti se composait d’une poignée de politiciens fascistes qui cherchaient à faire carrière dans la contre-révolution en attaquant le Parti communiste et l’Union soviétique, ce qui leur valut des subsides de la part de différents groupements réactionnaires au pouvoir et de la part des impérialistes.)) et le Parti démocrate-socialiste((Le Parti démocrate-socialiste fut constitué en août 1946 par la fusion du “Parti constitutionnel démocratique” et du “Parti national-socialiste”. Il comprenait essentiellement des politiciens réactionnaires et la lie des milieux féodaux au temps des seigneurs de guerre du Peiyang.)), deux petits partis qui n’ont jamais eu le moindre prestige dans le pays, ainsi que certaines “notabilités”((Allusion à des politiciens sans scrupule tels que Wang Yun-wou, Fou Se-nien et Hou Tcheng-tche, qui se posaient en personnalités sans affiliation de parti et servaient en fait de façade à l’“Assemblée nationale” montée par Tchiang Kaï-chek.)), et il est à prévoir que d’autres éléments du centre passeront du côté de la réaction. La raison en est que les forces démocratiques en Chine grandissent de jour en jour alors que les forces réactionnaires s’isolent de plus en plus; c’est ce qui fait que la ligne de démarcation entre l’ennemi et nous doit être tracée avec cette netteté. Tous les éléments qui se cachent dans le front démocratique pour tromper le peuple se montreront finalement sous leur vrai jour et seront répudiés par le peuple, alors que les rangs populaires anti-impérialistes et antiféodaux s’élargiront encore davantage, parce qu’ils auront tracé une ligne de démarcation nette entre eux-mêmes et ces réactionnaires dissimulés.

9. Le développement de la situation internationale est extrêmement favorable à la lutte du peuple chinois. La force grandissante de l’Union soviétique et les succès de sa politique étrangère, la tendance des peuples du monde à s’orienter de plus en plus vers la gauche et l’essor continu de leurs luttes contre les forces réactionnaires de l’intérieur et de l’extérieur sont les deux grands facteurs qui ont contraint et qui continueront à contraindre l’impérialisme américain et ses laquais dans différents pays à un isolement toujours plus complet. Si l’on y ajoute le facteur d’une crise économique inévitable aux Etats-Unis, on voit que l’impérialisme américain et ses laquais seront acculés à une situation pire encore. La puissance de l’impérialisme américain et de son valet Tchiang Kaï-chek n’est que momentanée; leurs offensives peuvent être brisées. Le mythe que les offensives des réactionnaires ne peuvent être écrasées ne doit trouver aucun crédit dans nos rangs. Le Comité central a insisté là-dessus à plusieurs reprises, et le développement de la situation internationale et intérieure confirme de plus en plus nettement l’exactitude de ce jugement.

10. Pour gagner le répit nécessaire au complétement de ses troupes et déclencher une nouvelle offensive, pour obtenir des Etats-Unis d’autres prêts et d’autres envois de munitions, et pour apaiser la colère du peuple, Tchiang Kaï-chek recourt à une nouvelle ruse en demandant la reprise de prétendues négociations de paix avec notre Parti((Le 16 janvier 1947, par suite des échecs répétés de ses offensives militaires et de la détérioration continuelle de sa situation militaire, le gouvernement du Kuomintang demanda au Parti communiste chinois, par l’intermédiaire de l’ambassadeur des Etats-Unis en Chine auprès du gouvernement du Kuomintang, John Leighton Stuart, d’être autorisé à envoyer des délégués à Yenan pour entamer des “négociations de paix”, dans l’intention d’obtenir un répit pour préparer une nouvelle offensive. Cette nouvelle ruse des Etats-Unis et de Tchiang Kaï-chek fut aussitôt démasquée complètement par le Parti communiste chinois. Celui-ci fit observer que les négociations ne pourraient être reprises que si deux conditions minima étaient remplies: 1) abolition de la pseudo-Constitution fabriquée par le Kuomintang en violation des résolutions de la Conférence consultative politique, et 2) évacuation par les troupes du Kuomintang de tout le territoire des régions libérées qu’elles avaient occupé après l’entrée en vigueur de l’Accord de trêve le 13 janvier; faute de quoi, il serait impossible de garantir que le Kuomintang ne déchire pas à nouveau un accord conclu par de nouvelles négociations. Quand le gouvernement du Kuomintang comprit que sa ruse de “paix” ne réussissait pas, il notifia leur départ, les 27 et 28 février, à tous les délégués du Parti communiste chinois qui séjournaient à Nankin, Changhaï et Tchongking pour négocier et établir la liaison, et il annonça la rupture définitive des négociations entre le Kuomintang et le Parti communiste.)). La politique de notre Parti n’est pas de repousser ces “négociations”, mais d’en saisir l’occasion pour démasquer la ruse de Tchiang Kaï-chek.

11. Afin d’écraser complètement l’offensive de Tchiang Kaï-chek, il nous faut anéantir encore quarante à cinquante de ses brigades dans les quelques mois à venir; c’est la clé qui décidera de tout. Pour atteindre cet objectif, nous devons mettre pleinement à exécution la directive du Comité central du 1er octobre de l’an dernier sur le bilan de trois mois((Il s’agit du texte intitulé: “Bilan de trois mois”, pp. 113-119 du présent tome.)), et la directive donnée le 16 septembre de la même année par la Commission militaire sur la concentration de nos forces pour détruire les forces ennemies une à une((Il s’agit du texte intitulé: “Concentrer une force supérieure pour anéantir les forces ennemies une à une”, pp. 103-108 du présent tome.)). Ici, nous attirons une fois de plus l’attention des camarades de toutes les régions sur les points suivants:

a) Le problème militaire. Au cours des rudes combats qui se sont déroulés pendant les sept derniers mois, notre armée a prouvé qu’elle était tout à fait capable d’écraser l’offensive de Tchiang Kaï-chek et de remporter la victoire finale. Elle a amélioré et son équipement et sa tactique. Désormais, la tâche centrale dans l’édification de notre armée est de renforcer par tous les moyens notre artillerie et notre génie. Toutes les régions militaires, grandes et petites, et toutes les armées de campagne doivent résoudre les problèmes concrets qu’impliquera le renforcement de l’artillerie et du génie, et, en tout premier lieu, les deux problèmes de l’instruction de cadres et de la fabrication de munitions.

b) Le problème agraire. Sur environ deux tiers du territoire de chaque région libérée, la directive du 4 mai 1946 du Comité central((Il s’agit de la “Directive sur le problème agraire” du Comité central du Parti communiste chinois, datée du 4 mai 1946. Voir “Bilan de trois mois”, note 4, p. 119 du présent tome.)) a été mise à exécution, le problème agraire résolu et la politique de la terre à ceux qui la travaillent appliquée; c’est là un grand succès.Il reste toutefois un tiers environ du territoire où les efforts doivent être poursuivis pour mobiliser sans réserve les masses et mettre à exécution la politique de la terre à ceux qui la travaillent. Dans divers endroits où cette politique a été appliquée, il y a encore des insuffisances: le problème n’a pas été résolu à fond; la raison principale en est que les masses n’ont pas été mobilisées sans réserve et qu’en conséquence la confiscation et la distribution des terres n’ont pas été effectuées de façon radicale, ce qui a provoqué le mécontentement des masses. En de tels endroits, nous devons procéder à une soigneuse vérification et réaliser l’équilibre((“Réaliser l’équilibre” était une mesure politique adoptée dans les régions libérées anciennes, où une réforme agraire relativement complète avait été accomplie. Son objet était de résoudre le problème de l’insuffisance des terres et des autres moyens de production dont souffraient certains paysans pauvres et salariés agricoles, ainsi que d’autres problèmes laissés en suspens pendant la réforme. La méthode consiste en un rajustement rationnel, dans un cadre relativement restreint, des terres et des autres moyens de production, de façon à prendre à ceux qui en ont de meilleurs pour donner à ceux qui ont de moins bons, à prendre à ceux qui disposent de surplus pour donner à ceux qui n’ont pas assez.)) pour que les paysans n’ayant pas ou n’ayant que peu de terre en obtiennent et que mauvais hobereaux et tyrans locaux soient tous punis. Au cours de tout le processus d’exécution de la politique de la terre à ceux qui la travaillent, nous devons nous allier fermement avec les paysans moyens; il est absolument inadmissible d’empiéter sur les intérêts des paysans moyens (y compris les paysans moyens aisés); si les intérêts des paysans moyens ont été lésés, ceux-ci doivent obtenir compensation et excuses. Par ailleurs, durant et après la réforme agraire, il faut accorder la considération appropriée au cas des paysans riches et des moyens et petits propriétaires fonciers en général, dans la mesure où les masses y consentent, et il faut le faire conformément à la “Directive du 4 Mai”. En résumé, nous devons, au cours du mouvement pour la réforme agraire dans les régions rurales, nous unir à plus de 90 pour cent de la population rurale qui approuvent la réforme agraire et isoler le petit nombre de réactionnaires féodaux qui s’y opposent, de manière à pouvoir réaliser rapidement la politique de la terre à ceux qui la travaillent.

c) Le problème de la production. Dans toutes les régions, il faut tout prévoir pour une longue durée et travailler avec acharnement à la production, pratiquer une stricte économie et trouver au problème financier une solution correcte fondée sur la double exigence de production et d’économie. Ici, le premier principe est de développer la production et d’assurer l’approvisionnement. Nous devons donc combattre le point de vue erroné qui consiste à mettre uniquement l’accent sur les finances et le commerce en négligeant la production agricole et industrielle. Le second principe est de tenir compte des besoins de l’armée comme de la population, des intérêts tant publics qu’individuels. Nous devons donc combattre le point de vue erroné qui consiste à ne tenir compte que d’un côté et à négliger l’autre. Le troisième principe est d’unifier la direction en même temps que de décentraliser la gestion. Donc, sauf là où les conditions exigent une gestion centralisée, nous devons combattre le point de vue erroné qui consiste à tout centraliser, sans tenir compte des circonstances, sans oser donner libre essor à la gestion décentralisée.

12. Notre Parti et le peuple chinois ont tout en main pour s’assurer la victoire finale; ceci ne fait pas l’ombre d’un doute. Mais cela ne signifie pas qu’il n’y aura plus de difficultés devant nous. La lutte de la Chine contre l’impérialisme et le féodalisme est une lutte de longue durée, les réactionnaires chinois et étrangers continueront à s’opposer de toutes leurs forces au peuple chinois, l’emprise de la domination fasciste dans les régions contrôlées par Tchiang Kaï-chek se resserrera davantage; temporairement, certains territoires des régions libérées seront occupés par l’ennemi ou deviendront des zones de guérillas, une partie des forces révolutionnaires pourra subir momentanément des pertes, et au cours d’une longue guerre, nous aurons bien sûr des dépenses en ressources humaines et matérielles. Tous les camarades du Parti doivent tenir pleinement compte de tout cela et être prêts à surmonter systématiquement toutes les difficultés avec une volonté indomptable. Les forces réactionnaires ont leurs difficultés, et nous avons les nôtres. Mais les difficultés des forces réactionnaires sont insurmontables, parce que ces forces s’acheminent vers la mort, sans aucune perspective d’avenir. Nos difficultés peuvent être surmontées, parce que nous sommes des forces jeunes et montantes ayant un avenir lumineux.

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