5. Amendements et additions au projet de constitution

Sur le projet de constitution de l’URSS

Staline

5. Amendements et additions au projet de constitution

Passons aux amendements et additions que les citoyens ont proposés au cours de la discussion du projet par l’ensemble du peuple. On sait que la discussion populaire du projet de Constitution a donné un nombre assez considérable d’amendements et d’additions qui, tous, ont été publiés dans la presse soviétique.

   Etant donné la grande diversité des amendements et leur valeur inégale, il serait bon à mon avis de les diviser en trois catégories. Le trait distinctif des amendements de la première catégorie, c’est qu’ils ne traitent pas des problèmes de la Constitution, mais de l’activité législative courante des futurs organismes législatifs. Certaines questions d’assurances, certaines questions touchant l’édification des kolkhoz, l’édification industrielle, les finances, tel est le sujet de ces amendements. Les auteurs de ces amendements n’ont visiblement pas compris la différence entre les problèmes constitutionnels et les problèmes de législation courante.

   C’est pour cela précisément qu’ils s’efforcent de faire rentrer dans la Constitution le plus de lois possible, ce qui conduirait à faire de la constitution quelque chose comme un code des lois. Or la Constitution n’est pas un code. Elle est la loi fondamentale, et rien que la loi fondamentale. La Constitution n’exclut pas mais suppose l’activité législative courante des futurs organismes législatifs.

   La Constitution donne une base juridique à la future activité législative de ces organismes. Aussi les amendements et additions de ce genre doivent-ils être, selon moi, renvoyés aux futurs organismes législatifs du pays, comme n’ayant pas de rapport direct avec la Constitution.

   Dans la deuxième catégorie doivent être rangés les amendements et additions qui visent à introduire dans la Constitution des données historiques ou des déclarations sur ce que le pouvoir soviétique n’a pas encore conquis, et qu’il doit conquérir. Marquer dans la Constitution les difficultés que le Parti, la classe ouvrière et tous les travailleurs ont surmontées durant de longues années dans la lutte pour la victoire du socialisme ; indiquer dans la Constitution le but final du mouvement soviétique, c’est-à-dire l’édification de la société communiste intégrale : tel est le sujet de ces amendements, qui se répètent en de nombreuses variantes.

   Je pense que ces amendements et additions doivent eux aussi être mis de côté, comme n’ayant pas de rapport direct avec la Constitution. Celle-ci est l’enregistrement et la consécration législative des conquêtes déjà obtenues et assurées. Si nous ne voulons pas altérer ce caractère fondamental de la Constitution, nous ne devons pas la remplir de données historiques sur le passé ou de déclarations sur les conquêtes futures des travailleurs de l’U.R.S.S. Nous avons pour cela d’autres voies et d’autres documents.

   Enfin, dans la troisième catégorie il convient de ranger les amendements et additions ayant un rapport direct avec le projet de Constitution. Une partie considérable des amendements de cette catégorie ont un caractère rédactionnel. On pourrait donc les renvoyer à la Commission de rédaction qui, je pense, sera constituée à ce congrès et à laquelle on confiera la rédaction définitive du texte de la nouvelle Constitution.

   Quant aux autres amendements de la troisième catégorie, ils ont une importance substantielle, et il faut, à mon avis, en dire ici quelques mots.

   1. Tout d’abord en ce qui concerne les amendements à l’article 1 du projet de Constitution. Il y a quatre amendements. Les uns proposent au lieu des mots « Etat des ouvriers et des paysans », de dire : « Etat des travailleurs ». D’autres proposent d’ajouter aux mots « Etat des ouvriers et des paysans » les mots : « et des travailleurs intellectuels ». D’autres encore proposent au lieu des mots « Etat des ouvriers et des paysans », de dire : « Etat de toutes les races et nationalités peuplant le territoire de l’U.R.S.S. ». D’autres enfin proposent de remplacer les mots « des paysans » par les mots « des kolkhoziens » ou par les mots : « des travailleurs de l’agriculture socialiste ». Faut-il accepter ces amendements ?

   Je pense que non. De quoi parle l’article 1 du projet de Constitution ?

   De la composition de classe de la société soviétique. Nous, marxistes, pouvons-nous dans la Constitution ne rien dire de la composition de classe de notre société ? Evidemment non. La société soviétique se compose, comme on sait, de deux classes : les ouvriers et les paysans. C’est de cela précisément que traite l’article 1 du projet de Constitution. Par conséquent, l’article 1 reflète bien la composition de classe de notre société. On peut demander : Et les travailleurs intellectuels ?

   Les intellectuels n’ont jamais été et ne peuvent être une classe, ils ont été et demeurent une couche sociale recrutant ses membres parmi toutes les classes de la société. Dans l’ancien temps, les intellectuels se recrutaient parmi les nobles, la bourgeoisie, en partie parmi les paysans et, seulement dans une proportion très insignifiante, parmi les ouvriers. A notre époque, à l’époque soviétique, les intellectuels se recrutent surtout parmi les ouvriers et les paysans.

   Mais quelle que soit la façon dont ils se recrutent, quel que soit le caractère qu’ils revêtent, les intellectuels sont néanmoins une couche sociale, et non une classe. Cet état de choses ne portetil pas atteinte aux droits des travailleurs intellectuels ? Pas du tout !

   L’article 1 du projet de Constitution parle, non des droits des diverses couches de la société soviétique, mais de la composition de classe de cette société. Quant aux droits des diverses couches de la société soviétique, y compris ceux des travailleurs intellectuels, il en est parlé principalement aux chapitres X et XI du projet de Constitution. De ces chapitres il ressort que les ouvriers, les paysans et les travailleurs intellectuels sont complètement égaux en droits, dans toutes les sphères de la vie économique, politique, sociale et culturelle du pays. Par conséquent, il ne peut être question d’atteinte aux droits des travailleurs intellectuels.

   Il faut en dire autant des nations et des races faisant partie de l’U.R.S.S. Au chapitre II du projet de Constitution il est dit déjà que l’U.R.S.S. est une union librement consentie de nations égales en droits. Faut-il répéter cette formule à l’article I du projet de Constitution, qui traite non de la composition nationale de la société soviétique, mais de sa composition de classe ?

   Il est clair que non. Quant aux droits des nations et des races faisant partie de l’U.R.S.S., il en est parlé aux chapitres II, X et XI du projet de Constitution. De ces chapitres il ressort que les nations et les races de l’U.R.S.S. jouissent des mêmes droits dans toutes les sphères de la vie économique, politique, sociale et culturelle du pays. Par conséquent, il ne peut être question d’atteinte aux droits des nationalités. On aurait également tort de remplacer le mot « paysan » par le mot « kolkhozien » ou par les mots « travailleur de l’agriculture socialiste ». D’abord, il existe encore parmi les paysans, outre les kolkhoziens, plus d’un million de foyers de non-kolkhoziens. Comment faire ? Les auteurs de cet amendement pensent-ils ne pas en tenir compte ?

   Ce ne serait pas raisonnable. En second lieu, si la majorité des paysans ont passé à l’économie kolkhozienne, cela ne veut pas encore dire qu’ils aient cessé d’être des paysans, qu’ils n’aient plus d’économie personnelle, de foyer personnel, etc. Troisièmement, il faudrait substituer également au mot « ouvrier » les mots « travailleur de l’industrie socialiste », ce que pourtant les auteurs de l’amendement ne proposent pas. Enfin, est-ce que la classe des ouvriers et la classe des paysans ont déjà disparu chez nous ?

   Et si elles n’ont pas disparu, faut-il rayer du vocabulaire les dénominations établies pour elles ?

   Les auteurs de l’amendement ont sans doute en vue, non pas la société actuelle, mais la société future, lorsqu’il n’y aura plus de classes et que les ouvriers et les paysans seront devenus les travailleurs d’une société communiste unique. C’est dire qu’ils anticipent manifestement. Or, en rédigeant la Constitution, il faut prendre comme point de départ, non le futur, mais le présent, ce qui existe déjà. La Constitution ne peut ni ne doit anticiper.

   2. Vient ensuite l’amendement à l’article 17 du projet de Constitution. Cet amendement propose de retrancher complètement l’article 17 selon lequel les Républiques fédérées conservent le droit de se retirer librement de l’U.R.S.S. Je pense que cette proposition n’est pas juste et que le congrès ne doit pas l’adopter. L’U.R.S.S. est une union librement consentie de Républiques fédérées égales en droits. Retrancher de la Constitution l’article relatif au droit de se retirer librement de l’U.R.S.S., c’est violer le principe de libre adhésion à cette union.

   Pouvons-nous prendre ce parti ?

   Je pense que nous ne pouvons ni ne devons le faire. On dit qu’en U.R.S.S. il n’est pas une seule République qui veuille se retirer de l’U.R.S.S. ; que, pour cette raison, l’article 17 n’a pas de portée pratique. Qu’il n’y ait pas chez nous une seule République désireuse de se retirer de l’U.R.S.S., c’est exact évidemment. Mais il ne s’ensuit nullement que nous ne devions pas fixer dans la Constitution le droit des Républiques fédérées à se retirer librement de l’U.R.S.S. Il n’existe pas en U.R.S.S. de République fédérée qui veuille prévaloir sur une autre. Mais il ne s’ensuit nullement que l’on doive retrancher de la Constitution l’article relatif à l’égalité en droits des Républiques fédérées.

   3. Ensuite, on propose de compléter le chapitre II du projet de Constitution par un nouvel article qui dit en substance que les Républiques socialistes soviétiques autonomes, après avoir atteint le niveau de développement économique et culturel voulu, peuvent être transformées en Républiques socialistes soviétiques fédérées. Peut-on accepter cette proposition ? Je pense que non. Elle est erronée non seulement en sa substance mais aussi en ses motifs.

   On ne peut motiver le passage des Républiques autonomes au rang de Républiques fédérées par leur maturité économique et culturelle, de même qu’on ne peut motiver le maintien de telle ou telle autre République sur la liste des Républiques autonomes, par son retard économique ou culturel. Ce ne serait pas là une manière de voir marxiste, léniniste. La République de Tatarie, par exemple, reste autonome, tandis que la République de Kazakhie devient fédérée ; mais cela ne signifie pas encore que la République de Kazakhie, du point de vue du développement culturel et économique, soit supérieure à la République de Tatarie.

   C’est le contraire qui est vrai. Il faut en dire autant, par exemple, de la République autonome des Allemands de la Volga et de la République fédérée de Kirghizie, dont la première, au point de vue culturel et économique, est supérieure à la seconde, bien que demeurant République autonome. Quels sont les indices motivant le passage des Républiques autonomes dans la catégorie des Républiques fédérées ?

   Ces indices sont au nombre de trois.

   Premièrement, il faut que la République soit périphérique, qu’elle ne soit pas entourée de tous côtés par le territoire de l’U.R.S.S. Pourquoi ?

   Parce que si la République fédérée conserve le droit de se retirer de l’U.R.S.S., il faut que cette République, devenue fédérée, ait la possibilité de poser, logiquement et pratiquement, la question de sa sortie de l’U.R.S.S. Or, cette question ne peut être posée que par la République qui, par exemple, est limitrophe d’un Etat étranger quelconque et, par conséquent, n’est pas entourée de tous côtés par le territoire de l’U.R.S.S. Certes, nous n’avons pas de Républiques qui posent pratiquement la question de leur sortie de l’U.R.S.S.

   Mais du moment qu’une République fédérée conserve le droit de se retirer de l’U.R.S.S. il faut faire en sorte que ce droit ne devienne pas un chiffon de papier dénué de sens. Prenons, par exemple, la République de Bachkirie ou de Tatarie. Admettons que ces Républiques autonomes aient été portées dans la catégorie des Républiques fédérées. Pourraient- elles poser la question, logiquement et pratiquement, de leur sortie de l’U.R.S.S. ? Non, elles ne le pourraient pas. Pourquoi ?

   Parce qu’elles sont entourées de tous côtés par des républiques et régions soviétiques, et elles n’ont pas à proprement parler par où sortir de l’U.R.S.S. (Rire général, applaudissements.) Aussi bien, l’on aurait tort de porter ces Républiques dans la catégorie des Républiques fédérées. Deuxièmement, il faut que la nationalité qui a donné son nom à la République soviétique y représente une majorité plus ou moins compacte. Prenons, par exemple, la République autonome de Crimée.

   C’est une république périphérique, mais les Tatars de Crimée ne forment pas la majorité dans cette République ; au contraire, ils y représentent la minorité. Par conséquent, il serait faux et illogique de faire passer la République de Crimée dans la catégorie des Républiques fédérées. Troisièmement, il faut que la république ne soit pas trop petite au point de vue de la population, que celle-ci, disons, ne soit pas inférieure, mais supérieure à un million au moins.

   Pourquoi ?

   Parce que ce serait une erreur de supposer qu’une petite république soviétique ayant une population minime et une armée insignifiante, pût exister comme Etat indépendant. On ne peut guère douter que les rapaces impérialistes auraient tôt fait de mettre la main dessus. Je pense qu’à défaut de ces trois indices objectifs, on aurait tort de poser en ce moment historique la question du transfert de telle ou telle république autonome dans la catégorie de Républiques fédérées.

   4. On propose ensuite de supprimer dans les articles 22, 23, 24, 25, 26, 27, 28 et 29 l’énumération détaillée de la division administrative et territoriale des République fédérées, en territoires et régions. Je pense que cette proposition est également inacceptable. Il est des gens en U.R.S.S. qui sont prêts, très volontiers et sans se lasser, à tailler et retailler territoires et régions, en jetant ainsi la confusion et l’incertitude dans le travail. Le projet de Constitution met un frein à ces gens-là. Et cela est fort bien, parce qu’ici comme en beaucoup d’autres choses, il nous faut une atmosphère de certitude, de la stabilité, de la clarté.

   5. Le cinquième amendement concerne l’article 33. On estime qu’il n’est pas rationnel de créer deux Chambres et l’on propose de supprimer le Soviet des nationalités. Je pense que cet amendement n’est pas juste non plus. Le système à Chambre unique serait meilleur que le système à deux Chambres, si l’U.R.S.S. était un Etat national homogène. Mais ce n’est pas le cas. L’U.R.S.S. est, on le sait bien, un Etat multinational. Nous possédons un organisme suprême, où sont représentés les intérêts communs à tous les travailleurs de l’U.R.S.S., indépendamment de leur nationalité. C’est le Soviet de l’Union. Mais outre les intérêts communs, les nationalités de l’U.R.S.S. ont encore leurs intérêts particuliers, spécifiques, liés à leurs particularités nationales. Peut-on négliger ces intérêts spécifiques ? Evidemment non.

   Est-il besoin d’avoir un organisme suprême spécial, reflétant ces intérêts spécifiques ? Incontestablement. Il ne peut faire de doute que sans cet organisme il serait impossible de gouverner un Etat multinational comme l’U.R.S.S. Cet organisme est la seconde Chambra, le Soviet des nationalités de l’U.R.S.S.

   On invoque l’histoire parlementaire des Etats d’Europe et d’Amérique ; on rappelle que le système à deux Chambres dans ces pays n’a eu que des résultats négatifs, que la seconde Chambre dégénère habituellement en un centre de réaction, qui freine la marche en avant. Tout cela est exact. Mais cela vient de ce que, dans ces pays, il n’y a pas d’égalité entre les Chambres. On sait que souvent l’on accorde à la seconde Chambre plus de droits qu’à la première ; ensuite, la seconde Chambre ne se constitue pas en règle générale par voie démocratique : souvent ses membres sont nommés par en haut. Il est certain que ces résultats négatifs n’existeront pas, si l’on établit l’égalité entre les deux Chambres et si l’on organise la seconde de façon aussi démocratique que la première.

   6. On propose ensuite une addition au projet de Constitution, demandant que soit égalisé l’effectif des deux Chambres. Je pense qu’on pourrait accepter cette proposition. Elle offre à mon avis des avantages politiques évidents, puisqu’elle souligne l’égalité des deux Chambres.

   7. Vient ensuite une addition au projet de Constitution, proposant d’élire les députés au Soviet des nationalités de la même manière que ceux du Soviet de l’Union par voie d’élections directes. Je pense que cette proposition, on pourrait également l’accepter. Il est vrai qu’elle peut présenter certains inconvénients d’ordre technique lors des élections. Mais en revanche elle offre un important avantage politique, parce qu’elle augmentera l’autorité du Soviet des nationalités.

   8. Vient ensuite une addition à l’article 40, qui propose de réserver au Présidium du Soviet suprême le droit d’édicter des actes législatifs provisoires. Je pense que cette addition n’est pas juste, et que le congrès ne doit pas l’adopter. Il faut enfin mettre un terme à cette situation où ce n’est pas un organisme unique qui légifère, mais toute une série d’organismes. Cette situation est contraire au principe de la stabilité des lois. Or, la stabilité des lois nous est nécessaire aujourd’hui plus que jamais. Le pouvoir législatif en U.R.S.S. doit être exercé par un seul organisme, le Soviet suprême de l’U.R.S.S.

   9. On propose ensuite une addition à l’article 48 du projet de Constitution, demandant que le président du Soviet suprême de l’U.R.S.S. soit élu, non par le Soviet suprême de l’U.R.S.S. mais par toute la population du pays. Je pense que cette addition n’est pas juste, car elle n’est pas conforme à l’esprit de notre Constitution. Suivant le système de notre Constitution, il ne doit pas y avoir en U.R.S.S. de président unique, élu comme tel par la population entière, au même titre que le Soviet suprême, et pouvant s’opposer à ce dernier.

   En U.R.S.S. la présidence est collective, elle est assurée par le Présidium du Soviet suprême, y compris le président du Présidium du Soviet suprême, élu non pas par toute la population, mais par le Soviet suprême, et tenu de rendre compte de son activité devant ce dernier. L’histoire montre que cette structure des organismes suprêmes est la plus démocratique, et qu’elle garantit le pays contre des éventualités indésirables.

   10. Vient ensuite un amendement au même article 48 proposant de porter vice-présidents au Présidium du Soviet le nombre des suprêmes à 11, à raison d’un vice-président par République fédérée. Je pense que l’on pourrait accepter cet amendement, qui améliore les choses et ne peut que renforcer l’autorité du Présidium du Soviet suprême de l’U.R.S.S.

   11. Vient ensuite un amendement à l’article 77. Il demande que soit organisé un nouveau commissariat de l’U.R.S.S., le commissariat du peuple de l’Industrie de la Défense. Je pense qu’il serait bon d’accepter aussi cet amendement (applaudissements), car le moment est venu de faire une place spéciale à notre industrie de la Défense et de la doter d’un commissariat. Il me semble que ceci ne pourrait qu’améliorer la défense de notre pays.

   12. Vient ensuite un amendement à l’article 124 du projet de Constitution, demandant que soit interdit l’exercice des cultes religieux. Je pense qu’il faut rejeter cet amendement, comme n’étant pas conforme à l’esprit de notre Constitution.

   13. Enfin, encore un amendement plus ou moins essentiel. Je parle de l’amendement à l’article 135 du projet de Constitution. Il propose de priver des droits électoraux les desservants du culte, les anciens gardes blancs, tous les ci devant et les personnes qui ne font pas un travail d’utilité publique, ou tout au moins de limiter les droits électoraux des individus de cette catégorie en ne leur accordant que le droit d’élire sans pouvoir être élu. Je pense que cet amendement doit également être rejeté.

   Le pouvoir soviétique a privé de leurs droits électoraux les éléments non travailleurs et exploiteurs, non à perpétuité mais provisoirement, pendant une certaine période. Il fut un temps où ces éléments faisaient ouvertement la guerre au peuple et s’opposaient aux lois soviétiques. La loi soviétique qui les privait du droit électoral fut la réponse du pouvoir des Soviets à cette opposition. Depuis lors il s’est passé pas mal de temps. Durant la période écoulée, nous avons obtenu ce résultat que les classes exploiteuses ont été supprimées et le pouvoir soviétique est devenu une force invincible.

   Le moment n’est-il pas venu de raviser cette loi ?

   Je pense que oui. On dit qu’il y a là un danger, parce que dans les organismes suprêmes du pays peuvent se glisser des éléments hostiles au pouvoir soviétique, anciens gardes blancs, koulaks, popes, etc. Mais que peut-on craindre ici ? Qui craint le loup n’aille pas au bois. (Joyeuse animation dans la salle, vifs applaudissements.)

   D’abord, les anciens koulaks, gardes blancs ou popes ne sont pas tous hostiles au pouvoir soviétique. Ensuite, si le peuple élit, çà et là, des hommes hostiles, cela voudra dire que notre travail d’agitation ne vaut rien, et que nous avons parfaitement mérité cette honte ; si au contraire notre travail d’agitation est fait à la manière bolchevique, le peuple ne laissera pas pénétrer les éléments hostiles dans ses organismes suprêmes. Par conséquent, il faut travailler et ne pas pleurnicher. (Vifs applaudissements.)

   Il faut travailler et ne pas attendre que les choses vous soient servies toutes prêtes, par la voie de dispositions administratives.

   Déjà en 1919 Lénine disait que le temps était proche où le pouvoir des Soviets jugerait utile d’introduire le suffrage universel sans aucune restriction. Notez-le bien : sans aucune restriction. Il le disait alors que l’intervention militaire étrangère n’était pas encore liquidée, et que notre industrie et notre agriculture étaient dans une situation désespérée. Dix-sept ans ont passé depuis. N’est-il pas temps, camarades, de nous conformer à cette indication de Lénine ?

   Je crois qu’il est temps.

   Voici ce que Lénine disait en 1919 dans son ouvrage « Projet de programme du Parti communiste (bolchevik) russe ». Permettez-moi de vous en donner lecture : Le Parti communiste russe doit expliquer aux masses laborieuses, généralisation erronée des nécessités historiques passagères, que le électoraux à une partie des citoyens en République soviétique, ne comme ce fut le cas dans la plupart des républiques démocratiques afin d’éviter une retrait des droits concerne nullement, bourgeoises, une catégorie déterminée de citoyens, que l’on déclare privés de droits pour la vie ; il ne concerne que les exploiteurs, que ceux qui, en dépit des lois fondamentales de la République socialiste soviétique, persistent à défendre leur position d’exploiteurs, à maintenir les rapports capitalistes.

   Par conséquent, dans la République des Soviets, d’une part, à mesure que le socialisme se fortifie de jour en jour et que diminue le nombre de ceux qui ont la possibilité objective de rester des exploiteurs ou de maintenir les rapports capitalistes, la proportion des individus privés du droit électoral diminue. Aujourd’hui, cette proportion ne dépasse guère en Russie, 2 ou 3 %. D’autre part, dans le plus proche avenir, la fin de l’invasion étrangère et l’achèvement de l’expropriation des expropriateurs, peuvent sous certaines conditions, créer un état de choses tel que le pouvoir d’Etat prolétarien choisira d’autres moyens pour écraser la résistance des exploiteurs, et introduira le suffrage universel sans aucune restriction. (t. XXIV, p. 94, éd. Russe.)

   C’est clair, je pense.

   Voilà ce qu’il en est des amendements et additions au projet de la Constitution de l’U.R.S.S.

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