L’administration du Parti

L’administration du Parti

Cahiers du Bolchevisme

Où en sommes-nous?

   La crise révolutionnaire mûrit et continuera de mûrir. Mais la victoire de la Révolution ne vient jamais d’elle-même. Il faut la préparer et la conquérir. Or, seul un fort Parti prolétarien révolutionnaire peut la conquérir.
Staline

   Dans les conjonctures actuelles, Staline, à l’heure où des événements décisifs se préparent et nécessitent du Parti communiste français des efforts d’intelligence et d’organisation toujours plus grands pour la conquête des larges masses populaires, il est des retards qui deviennent absolument insupportables et qu’à tout prix il nous faut vaincre.

   Depuis plus de deux ans, depuis la chute définitive du « Groupe », malgré un travail suivi, opiniâtre, notre Parti continue, dans son ensemble, à mijoter dans une administration des plus empirique.

   Cependant que les masses travailleuses de notre pays, du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest, exigent de lui, pour les luttes difficiles, une forte organisation, une plus ferme direction, plus souple et plus sûre.

   Nos organes de contrôle, d’études, restent faibles, désespérément faibles. Beaucoup trop de cellules, de rayons, de régions, même, restent dans l’ornière.

   C’est insupportable !

   Il faut en sortir.

   Plus que jamais nous nous devons de « taper sur le clou ». Nous voulons un Parti mieux organisé, parce que mieux administré.

   Certes, l’année 1934 que nous venons de clôturer nous a apporté, comparativement aux années précédentes, quelques résultats.

   Nous aurions dû faire beaucoup, beaucoup mieux.

   Encore faut-il souligner que ces résultats sont des résultats de trésorerie dus à plus de conscience, à une plus juste et plus saine compréhension des finances du Parti, qui fait que les cellules et les rayons n’attendent plus des régions, et celles-ci du Centre, les moyens financiers de travailler, et qu’ils ont su profiter de l’amnistie des dettes que le Centre a consentie aux régions et des pourcentages plus élevés qui ont été consentis sur les ristournes des cotisations.

   Mais du point de vue de l’administration, où sont les résultats, où sont même les signes révélateurs d’un sérieux redressement, d’un bon départ ?

   Nous montrerons plus loin par des démonstrations édifiantes que, dans le Parti, il n’y a encore rien ou presque rien; que le Parti, dans son administration, reste convalescent dans le désordre de ses capacités, de ses possibilités, de ses nécessités. Tout ce que nous avons pu mettre en valeur comme moyens d’administration, n’a reçu par-ci par-là, qu’une pénible acceptation.

   En dehors de quelques régions dont les efforts sont franchement louables, et où nous nous trouvons en bonne voie de réalisation, on peut affirmer que le Parti piétine, piétine misérablement.

   En 1933, nous nous devons encore d’apprendre au Parti l’alphabet de l’administration, de dire et de faire comprendre qu’administrer c’est organiser méthodiquement par la connaissance méticuleuse, scrupuleuse des choses et des hommes que l’on gère : qu’administrer c’est diriger.

   Administrer le Parti, c’est contrôler l’activité des membres du Parti et aussi l’activité des cellules, des rayons, des régions et du Centre, pour savoir placer les hommes et les choses à leur place afin d’obtenir les meilleurs rendements de propagande et d’action.

   Administrer le Parti, c’est établir de véritables statistiques d’organisation, c’est connaître sûrement nos forces, c’est faire de justes comparaisons et établir des rapports de forces, c’est savoir mesurer l’effort qu’il faut faire pour atteindre le but proposé.

   Administrer, c’est encore acquérir le moyen de découvrir rapidement nos faiblesses et nos maux, afin d’en sortir de même, c’est échapper aux incertitudes où nous sommes si souvent n’ayant pour juger de notre situation, de nos forces et de nos moyens d’action aucune estimation, même approximative, n’ayant de bas en haut du Parti, que de vagues « impressions » comme éléments d’appréciation.

   […] D’étudier et de bien connaître l’état de chaque organisation, de rayon de ville, le travail de chacun de ces comités, étudier et connaître la situation de chaque comité régional et provincial, étudier et connaître les cadres, les militants de la ville et des rayons ; signaler en temps utile aux comités du Parti les défauts constatés dans le travail de telle ou telle organisation du Parti ou de tel ou tel militant.

   Cet admirable extrait d’un rapport présenté en septembre dernier par le camarade Kaganovitch (I.C., n° 24, décembre 1934) qui s’adresse aux camarades du Parti russe, s’adresse également aux membres du Parti français qui se doivent d’apporter le plus grand soin à la préparation, des luttes révolutionnaires, comme nos camarades russes se doivent encore de consolider leur immense victoire en donnant au monde prolétarien l’exemple irrésistible du socialisme vainqueur.

   Nos responsables des cellules, des rayons, des régions, et même du Centre, ont-ils ce souci dominant? S’efforcent-ils toujours nécessairement à s’entraîner dans cette voie ?

   Et cependant il faudra bien s’y mettre enfin.

   Tant que dans tout le Parti nous ne nous serons pas tous engagés dans cette voie, nous n’aurons pas commencé à faire le premier pas vers une bonne et solide organisation. Et nous oublierons, par-dessus tout, les temps plus durs et plus difficiles de l’illégalité vers lesquels nous nous acheminons inévitablement.

   Depuis deux ans, nous ne cessons de répéter ces avertissements. Nous les répéterons autant qu’il sera nécessaire, tant que le Parti ne possédera pas une véritable et puissante administration.

Où est le mal ?

   Nous avons dit plus haut, et nous le démontrerons encore mieux plus loin, que les améliorations constatées dans la gestion du Parti étaient d’ordre strictement financier, de trésorerie. À quoi devons-nous ces heureux résultats qui sont loin cependant à nous donner entière satisfaction?

   Ceci est dû à ce qu’enfin à tous les échelons du Parti on a commencé à « considérer » la fonction du trésorier, qu’on a enfin donné à ce dernier une toute petite place dans les comités de direction, alors qu’il n’y a pas si longtemps, le rôle du trésorier était passif, sinon jugé superflu, qu’il était tout au plus, comme « Médor », gardien de la caisse, avec le soin jaloux de n’en rien laisser sortir.

   Donc on « considère » le trésorier. C’est bien, c’est un véritable progrès. Mais ce n’est pas suffisant. « Médor » est beaucoup plus exigeant. Il faut lui accorder une place plus large, plus importante. Il faut qu’il l’exige lui-même. Il faut que l’administrateur-trésorier ait un rôle politique mieux compris et mieux déterminé pour qu’il lui soit permis d’apporter dans tous les comités de direction, ses chiffres contrôlés, ses évaluations, ses statistiques, ses appréciations.

   N’exagérons rien, mais disons tout de même que si par son travail minutieux et ingrat, l’administrateur-trésorier n’est pas tout dans l’organisation, il peut et doit cependant aider beaucoup les secrétaires dans la direction de leurs travaux, dans l’établissement de leurs plans et de leurs perspectives.

   Par son effort soutenu de chaque jour, une bonne administration, au lieu de laisser au hasard le soin de régler ou plutôt de tout dérégler, contrôle, compare, mesure, estime et apporte ainsi les matériaux les plus résistants à tout travail vraiment constructif.

   Le contraire, c’est-à-dire ce qui existe, nous vaudra toujours des situations artificielles tirées de gymnastiques audacieuses, nous vaudra une insupportable bureaucratie.

   Écoutez ce que dit un de nos trésoriers qui a compris et qui s’en trouve très joyeux :

   Mettre de l’ordre et de la clarté dans nos procédés, dans nos méthodes financières et de trésorerie, est-ce bureaucratie? Non, camarades.

   Ce travail nécessite-t-il des techniciens? Non, encore : l’expérience d’une année nous l’a démontré. (Extrait de l’Exploité des Ardennes.)

   Le Parti ne doit plus s’en laisser imposer par des pratiques abusives. Pour l’économie de ses forces, en vue des batailles décisives, le Parti doit-être administré judicieusement de la base au sommet.

   C’est par une bonne administration qu’on évitera le gaspillage de nos hommes et de nos forces, que nous emploierons mieux notre temps et notre argent, que nous serons dans les batailles de chaque jour, là où nous devons être.

   C’est par une bonne administration de nos cellules, de nos rayons, de nos régions et du Centre que nous arrêterons dans une large mesure les fluctuations insolites dans le Parti, que nous assurerons le meilleur recrutement, que nous augmenterons dans les larges masses travailleuses le crédit et la confiance dans le seul Parti révolutionnaire : le Parti de Lénine.

   Qui niera le mal que cause au Parti un mauvais ou indélicat trésorier, une mauvaise administration?

   Que de pertes nous éviterons si nous exerçons un véritable contrôle !

   C’est, dit encore Kaganovitch, un peu ennuyeux de traiter de ces questions tous les jours, Et c’est seulement quand on sent l’odeur du « brûlé », quand le rayon a une défaillance que tout le monde commence à s’en occuper.

   On a dit, et on le répète abusivement, que ce que nous demandons aux camarades administrateurs-trésoriers, c’est difficile ou qu’il faudrait pour cela des compétences professionnelles, une technicité développée. Ce n’est pas juste, ainsi que le camarade des Ardennes l’a déjà dit. Cette opinion exprime seulement et surtout de la paresse, de la passivité, des vieux sentiments de routine et de « spontanéité ». Cela est contraire aux principes élémentaires de l’organisation. Cela n’est pas communiste.

   Ce qu’il faut à nos camarades administrateurs-trésoriers, c’est moins de technicité que de convictions solides ; c’est la confiance en soi, pour le travail révolutionnaire à accomplir, en prenant sa part de direction là où le Parti nous a placés.

   On a dit et on répète encore qu’administrer comme nous le demandons c’est créer de la bureaucratie, de la paperasserie inutile. Cette appréciation est aussi fausse. Comme paperasserie, nous avons tout juste mis en circulation un simple carnet de trésorerie avec toutes les explications précises pour que nous puissions tous parler le même langage comptable, et une « feuille mensuelle de décompte et de statistique d’organisation ». C’est toute notre paperasserie.

   C’est par l’administration qu’on tue la bureaucratie, la paperasserie.

   C’est par l’administration, par son contrôle, systématique qu’on peut empêcher que des forces soient perdues, que des militants se « gâtent », qu’on redresse les mauvais fonctionnaires, ou ceux qui jouissent d’une confiance toute sentimentale et qui se sont couverts de « poussière ».

   La décentralisation qui se poursuit, et à laquelle nous avons aidé par nos mesures financières en accordant des pourcentages plus élevés aux organismes de base, développera nos forces d’administration, ne serait-ce qu’en secouant la « poussière » qui s’est accumulée dans nos vieilles régions.

Le trésorier de rayon

   Nous avons accordé et nous accorderons de plus en plus d’importance aux trésoriers de rayons.

   Le trésorier de rayon est à notre avis le pivot de l’administration du Parti.

   C’est lui qui contrôle et qui régularise le travail et la vie de nos cellules.

   C’est par son activité, par l’établissement des « feuilles de décompte » qui se trouvent à la base de notre administration, que le trésorier de rayon liera nos forces et donnera à la région tous les éléments d’appréciation nécessaires dont elle a besoin.

   Et le trésorier de rayon ne doit pas seulement être celui qui établit son budget, qui fait ses statistiques, c’est aussi l’ouvrier qui peut travailler avec succès à l’un des plus gros problèmes du moment pour le Parti : l’éducation de nos membres et des masses.

   Par l’organisation de la diffusion de la littérature révolutionnaire, journaux et brochures, dans nos cellules, dans toutes les réunions et manifestations, non seulement on doit contribuer à élever le niveau théorique de nos membres, aider considérablement à l’agitation du Parti, mais on doit aussi, par ce moyen sûr et puissant, trouver des ressources supplémentaires, autres que celles provenant des cotisations, largement insuffisantes.

*    *   *

   Dans tous les sens il faut travailler sans relâche, avec courage.

   Notre Parti nourrit de grands et légitimes espoirs. Nous avons une confiance inébranlable en lui et en ses destinées.

   Que les administrateurs-trésoriers et les responsables des cellules, rayons et régions prennent de plus en plus conscience de leur rôle; qu’ils apportent dans l’exercice de leur fonction tout le sérieux et toute la force de leurs convictions ; qu’ils tuent par leur travail tenace la passivité et la bureaucratie; qu’ils aiment la responsabilité que le Parti leur donne dans la gestion des choses et des hommes en se pénétrant profondément des paroles suivantes du camarade Kaganovitch que nous avons plusieurs fois citées à si juste titre :

   II faut aimer le travail du Parti.

   Les éléments bureaucratiques formels y sont autrement plus criminels que dans tout autre travail, parce qu’il s’agit ici d’hommes d’avant-garde, de la fleur de la classe ouvrière.

La situation des régions au point de vue trésorerie

   Dans l’article des Cahiers du 15 décembre, nous indiquions que 25 régions avaient au cours de novembre effectué des versements à la trésorerie centrale.

   En décembre, ce sont 29 régions soit 4 de plus. Parmi elles 21 avaient versé en novembre, 5 en octobre, 1 en juin, et 2 tout nouvellement créées.

   Décembre 1934 voit sur décembre 1933 une plus-value de 10.519 fr 25 de sorte que pour l’année entière nous enregistrons au chapitre cotisation une plus-value de 57.062 fr. 85 sur l’année précédente.

   Cette plus-value est égale ou plutôt légèrement supérieure au supplément de timbres fournis aux: régions comparativement à 1933;

Résultat : le pourcentage des paiements comparé aux fournitures est de 48,57 % contre 38,81 % en 1933.

   Progrès sensible et qui nous laisse prévoir après les retours normaux de timbres un pourcentage de 60 à 65 % alors que 1933 ne nous donnait que 49,30 %.

   Le classement des régions subit peu de changement puisque des 20 premières, 2 seulement n’ont fait aucun versement en décembre : l’Aisne et Marne et la Lyonnaise.

   Signalons, toutefois, la région du Gard-Lozère qui de 12e passe 7e, la Drôme-Ardèche de 13e passe 11e, alors que l’Aisne et Marne qui détenait cette dernière place rétrograde à la 13e, cependant que la région Aude-Hérault de 22e passe 18e.

   Aucune des 7 régions signalées comme n’ayant pas encore soldé 1933 n’est parvenue à le faire en décembre quoique 4 d’entre elles aient fait des versements : Méditerranéenne, Nord, Paris-Ouest et Troyenne.

   Quelques enseignements découlant de la décentralisation.

   Les progrès ci-dessus sont incontestables. Ils démontrent la volonté évidente des camarades des régions bien décidés à avoir une trésorerie saine.

   Chose curieuse, ces progrès se manifestent particulièrement dans nos nouvelles régions issues de la décentralisation.

   C’est ainsi que la région du Sud-Est (Nice) issue de la région méditerranéenne se classe par l’importance des versements sur timbres 1934 la 5e de nos régions alors que la région mère n’a pas encore soldé 1933.

   Même observation pour la région Côte-d’Or-Yonne classée 8e alors que la Troyenne de laquelle elle sort n’a pas encore non plus soldé 1933, et pour les Deux-Savoies classée 17e alors que les Alpes dont elle sort arrive péniblement 36e quoique ses effectifs soient à peu près semblables.

   Mieux, prenons la région Lyonnaise. Une première décentralisation : l’Ardèche enlevée en 1932 forme avec la Drôme une nouvelle région, puis en 1933 nouvelle amputation : la Saône-et-Loire qui forme seule une région; enfin en juin 1934 dernière opération : la Loire forme une région. Cela nous fait 4 régions issues de l’ancienne. Voyons le classement de chacune dans le paiement des timbres 1934 :

   La région Drôme-Ardèche occupe le 11e rang, la Saône-et-Loire le 14e, la Loire le 16e, alors que la région Lyonnaise qui était 20e à fin novembre n’est plus à fin décembre que 23e, dépassée même par de toutes petites régions.

   Quels enseignements tirer de ce qui précède ? C’est que là où nous avons des cadres relativement plus neufs, « sans poussière », les progrès sont plus sensibles, et ce parce que les responsables de ces nouvelles régions sont beaucoup moins imprégnés des mauvaises habitudes et des pires routines que les uns et les autres nous nous efforçons de combattre et que nous arriverons, nous en avons la conviction, à faire disparaître complètement.

Progrès! oui, mais c’est encore la caisse qui trop souvent commande.

   Cependant, pour aussi satisfaisants qu’ils soient ces progrès ne nous donnent pas entière satisfaction.

   Sans doute nous pouvons prévoir qu’à fin janvier, 21 ou 22 régions au moins auront complètement liquidé leurs dettes ou plutôt le montant des timbres fournis en 1934, alors qu’en 1933 il nous fallait attendre fin mai pour en compter 16.

   Mais voyons les choses en face et reconnaissons franchement que nous n’avons pas atteint le but que nous nous étions assigné : l’amélioration de l’administration du Parti, de la plus petite des cellules au Centre.

   Presque partout l’assainissement des finances s’est produit ou bien est maintenant en bonne voie de réalisation, alors que dans le domaine de l’administration, partie intégrante de l’organisation, nous piétinons.

   Nous ne pouvons, en effet, pour aussi importante qu’ils soient, nous contenter des résultats obtenus dans la région de la Loire, dans le rayon des 8e et 9e de Paris-Ville cités en exemple dans les Cahiers du Bolchevisme, et, dans quelques autres coins, tels ceux des Ardennes, où, si nous en croyons l’hebdomadaire l’Exploité, celle-ci peut « avec certitude, indiquer ses effectifs, tenant compte d’une part des indications des feuilles de décompte des cellules (qui toutes sans exception établissent les dites feuilles) d’autre part des renseignements fournis par un secrétaire de rayon » (Exploité du 29 décembre 1934).

   Or, si nous en exceptons ces quelques coins, dans l’ensemble nous n’avons pas réalisé le principe essentiel qui est à la base des méthodes que nous préconisons, à savoir :

   L’acheminement chaque mois à l’échelon supérieur, en même temps que la feuille de décompte de timbres et de statistique d’organisation, l’acheminement, disons-nous, de la part lui revenant sur le produit des timbres vendus au cours du mois qui vient de s’écouler.

   Et l’erreur que commettent nos camarades bien intentionnés, qui ne veulent plus avoir de dette, c’est de considérer que les timbres fournis par le Centre aux régions constituent une dette dès leur arrivée à la région, alors que leur montant ne devient une dette réelle que lorsqu’ils ont été vendus aux adhérents. C’est à ce moment-là seulement qu’il faut l’éteindre et ne pas conserver par devers soi des sommes qui ne vous appartiennent pas.

   Cette erreur est commise par nos camarades parce qu’ils n’ont pas établi par avance un projet de budget fixant les recettes prévisibles et aménageant les dépenses indispensables (voir modèle à la fin de la brochure).

   Et dans ce cas, inévitablement : la caisse commande tous les problèmes, alors que dans une bonne organisation c’est l’administration qui met de l’ordre dans les affaires, institue un contrôle rigoureux, régularise les recettes et les dépenses et permet enfin aux responsables de faire face à toutes les tâches qui les sollicitent.

« Le mieux est souvent l’ennemi du bien »

   C’est un vieux proverbe mais combien juste dans les questions qui nous préoccupent.

   Dans les Cahiers du 15 décembre nous avons cité l’exemple d’une cellule du 9e arrondissement de Paris qui si elle n’avait aucune dette au rayon puisque son stock de timbres entièrement payés, mais non placés, s’élevait à 196 fr. 80 alors qu’elle n’avait en caisse que o fr. 55, se trouvait devant le problème d’avoir à faire face à un affichage urgent. Exemple qui montre la justesse du principe recommandé et grâce auquel, lorsqu’il est appliqué, permet à l’organisation intéressée de connaître exactement le quantum des sommes dont elle peut disposer et qui l’oblige, face à une dépense imprévue, à se préoccuper immédiatement de trouver la solution.

   Nous ne saurions trop insister auprès de nos régions, de nos rayons et de nos cellules pour que les unes et les autres se penchent attentivement et davantage qu’elles ne l’on fait jusqu’à présent sur ce problème, qu’ils tiennent compte de nos indications afin de ne restreindre en aucune façon la vie, l’agitation et la propagande de l’organisation. Le principe est le même pour toute l’organisation de bas en haut de l’échelle.

   Répétons-le, pour aménager nos dépenses, il nous faut à tout prix normaliser nos recettes et c’est là que l’établissement des feuilles mensuelles de décompte est indispensable.

Comment établir la « feuille de décompte »

   Avant le 10 de chaque mois, le trésorier de cellule inscrit sur sa feuille de décompte en suivant tout simplement les indications imprimées (voir tableau à la fin de cette brochure) :

1° Le mouvement des timbres au cours du mois;

2° Le compte des timbres et des cartes de sympathisants vendus au cours du mois, avec le détail du produit des timbres, la ristourne à conserver pour la cellule et la somme à adresser au rayon;

3° La statistique d’organisation du même mois.

   Puis il adresse sa feuille au trésorier du rayon.

   En possession des feuilles des cellules, le trésorier de rayon établit sa feuille suivant les indications des cellules pour les deuxième et troisième tableaux, le premier comportant le mouvement des timbres du rayon au cours du mois. Le trésorier du rayon adresse sa feuille, qui n’est que le résumé des feuilles de cellules, à la région avant le 15 de chaque mois.

   Et le trésorier de la région fait de même pour le Centre.

   Sans doute beaucoup de trésoriers de cellule n’ont pas encore eu de directives précises, tous n’en auront-ils pas dès le début de 1935, et leur demander de rattraper le retard serait entraver ou retarder l’acheminement des feuilles mensuelles de décompte, mais ces feuilles ont cet avantage que leur tenue peut commencer à n’importe quel mois de l’année en bloquant les mois qui précèdent.

   Nous leur demandons donc, dès qu’ils auront lu le présent article, dès que le secrétaire ou un camarade de leur cellule le leur aura communiqué, d’établir lesdites feuilles en continuant ensuite régulièrement chaque mois.

De l’ordre et de la clarté

   On laisse généralement le trésorier se débattre seul dans les questions financières. Bien rares sont les comités responsables qui examinent chaque mois dans son détail l’état de la caisse et des encaissements, les prévisions de recettes et dépenses pour le mois suivant, etc.

   C’est une erreur préjudiciable au développement de l’organisation. Sans argent on ne peut faire d’agitation et de propagande. Or, s’il est juste de charger le trésorier de préparer un devis, c’est la direction de l’unité (région, rayon, cellule) qui doit décider de la réalisation pratique du devis ou projet de budget et prendre les décisions de redressement qui s’imposent souvent d’après les états de recettes et dépenses, ou encore de rechercher dans l’agitation les meilleurs moyens pour trouver les ressources nécessaires à l’action politique envisagée.

   D’autre part, on méconnaît encore trop le rôle et la personnalité de l’administrateur, du trésorier. L’importance politique de ses fonctions est encore bien souvent considérée comme nulle ou presque.

   N’avons-nous pas vu pendant cette dernière période des secrétaires de régions importantes enlever à leur trésorier régional le mouvement des fonds résultant de la souscription contre le fascisme et la guerre, disposer des fonds recueillis et des ristournes sans liaison avec l’état général de trésorerie de la région.

   Est-ce là une bonne méthode? Non. C’est justement là que se trouve le vice fondamental que nous voulons faire disparaître, d’autant que ces mauvais exemples sont, tout ce qu’il y a de plus pernicieux quand ce sont les responsables des régions qui les donnent.

Autres mauvaises méthodes

   Est-ce aussi une bonne méthode que celle appliquée par un rayon d’une région parisienne qui a comme trésorier un simple teneur de livre ne visitant pas les cellules, ne dirigeant pas le travail des trésoriers de cellule ?

   Le résultat de cette méthode nous l’avons vu le 2 janvier lors de la visite de trois cellules dudit rayon.

   À la première, 7 présents sur 17 membres, le trésorier n’a pas de livre de caisse, il établit ses comptes par différence sur fiches, ne connaît pas le nombre des adhérents de la cellule, n’arrive à le fixer qu’en consultant le livre des procès-verbaux ; pas de contrôle des membres, ils payent quand ils veulent et souvent pas de timbres à leur délivrer; c’est ainsi qu’au cours de la réunion des camarades ont payé leurs cotisations sans recevoir de timbres, le trésorier devra ensuite aller en chercher auprès du trésorier de rayon. Au 2 janvier aucun matériel 1935 entre les mains du trésorier de cellule quoique ce matériel est à la disposition des régions depuis un mois et demi. Le trésorier de cellule ne connaît pas les feuilles mensuelles de décompte.

   Dans cette cellule, il y a un membre du Comité de rayon, au surplus membre de la Commission financière de la région. Remplit-il comme il se doit son rôle de dirigeant du rayon et de la région pour que pareille anarchie existe dans sa propre cellule?

   Deuxième cellule, 4 présents sur 14 adhérents, secrétaire et trésorier absents à la réunion. Un adhérent membre du Comité de rayon dirige les débats, mais personne pour remplacer le trésorier. Dans cette cellule, aucun timbre 1935 ;. Cette cellule se réunît à deux kilomètres du quartier qu’elle doit toucher? 4 nouveaux inscrits ne trouvant pas la cellule militent dans une localité voisine, le cas est signalé à la Conférence du rayon qui s’est tenue mi-décembre, aucune décision pour solutionner la question.

   Troisième cellule, 11 présents sur 19 adhérents. Un membre du Comité de rayon dirige les débats, le secrétaire étant absent ; également, absence du trésorier que personne ne remplace.

   Parmi les présents, des camarades sont en retard de 8 semaines de cotisations, quatre d’entre eux, adhérents depuis deux mois et demi, n’ont pas de carte, sauf une sur laquelle seul un timbre de contrôle, sans timbre de cotisation, et cependant ces camarades assistent régulièrement aux réunions hebdomadaires.

   Pas plus que dans les deux autres cellules, les timbres 1935 ne sont acheminés. Il en est probablement de même pour toutes les cellules du rayon.

   Le trésorier de la première cellule vient d’acheter un cahier blanc sur lequel il a établi ses colonnes et rubriques, ce qui lui a demandé un long et fastidieux travail, alors que nous avons à la disposition des cellules et rayons, depuis 2 ans, des carnets de comptabilité simples et expliqués.

   Nous posons la question : Est-ce ainsi que le Comité de rayon dirige?

   Est-ce ainsi qu’il lutte contre la bureaucratie et qu’il tient compte des directives données à différentes reprises?, directives soulignant l’importance politique du rôle du trésorier notamment dans les Cahiers du Ier octobre par le passage que nous reproduisons ci-après :

De plus en plus, avec la marche des événements la trésorerie deviendra une fonction politique de premier plan, la trésorerie de légale deviendra illégale, si nos trésoriers n’ont aucune méthode pour organiser le travail, nous laissons à penser ce que sera l’organisation et comment le Parti pourra accomplir ses tâches s’il n’a pas au préalable trouvé les ressources nécessaires.

   Qui oserait soutenir que nous avons tort d’insister sur cette question lorsqu’on se trouve en présence des faits que nous avons signalés plus haut.

   Le cas du rayon cité est-il unique ?

   Non pas. Si nous le citons c’est parce qu’il est le dernier repéré. Il nous faut dire que là comme ailleurs beaucoup de « poussière » reste à secouer. Il faut le faire sans tarder si nos organisations veulent sortir de l’ornière.

Les directives du XIIIe Plénum

   Y a-t-il une seule organisation du Parti : région, rayon ou cellule qui n’ait pas voté d’enthousiasme une résolution d’accord avec les thèses et décisions du XIIIe Plénum du C.E. de l’I.C. (décembre 1933)?

   Voter d’accord est une chose. Appliquer en est une autre.

   Nous en avons la démonstration pour ce qui concerne les questions élémentaires d’organisation que sont celles des statistiques d’organisation et de la perception des cotisations.

   Or, au XIIIe Plénum du C.E. de l’I.C. il a été posé comme premier pas dans la préparation à l’illégalité, la question de l’abandon des timbres et cartes du Parti.

   Combien de dirigeants du Parti, de région, de rayon ou de cellule se sont préoccupés d’examiner cette question si importante et sa répercussion sur l’état actuel de notre organisation?

   Et comme l’l.C. avait raison de rappeler au Parti français dans un article paru dans le n° 14 de l’Internationale Communiste (15 juin 1934) d’avoir sérieusement à y penser!

   Cet article n’a pas eu le résultat souhaitable, les vieilles routines les habitudes acquises sont difficiles à corriger. Cela ce n’est pas d’aujourd’hui que nous le savons, déjà en août 1932, dans le numéro spécial de la Correspondance Internationale traitant des questions d’administration nous écrivions :

   Aucun fonctionnaire du Parti ne frôle autant le danger de tomber dans la bureaucratie que le trésorier. Aucun de nos camarades n’a autant de tendance à ne pas adopter de nouvelles méthodes de travail, de ne pas réviser ce qu’il a appris, que le trésorier. Et pourtant, une des conditions les plus importantes pour le succès de son travail est justement, qu’il sache s’adapter, marcher de pair avec le développement du Parti, qu’il reconnaisse la nécessité des actions du moment. Il est donc indispensable que le trésorier acquiert des connaissances politiques, qu’il fasse de son travail une critique sans pitié, et s’entretienne avec ses collègues des expériences qu’il a faites.

   Est-ce une raison pour lancer le manche après la cognée et pour ne pas, comme nous le demande l’I.C., « se mettre à la tâche sérieusement et sans délai ».

   II ne suffit pas en effet, pour résoudre le problème, de penser comme le bureau d’une des plus importantes régions du Parti : « nous avons eu tant de mal pour arriver à faire payer les timbres à la commande que nous ne voulons pas envisager de changer de méthodes ».

   Comment feront alors les rayons et les cellules pour payer d’avance les timbres qu’ils n’auront plus.

   Ce bureau régional et ceux qui pensent comme lui, car il y en a, croient-ils que les échelons inférieurs acceptent encore de le faire, lorsqu’ils n’auront plus la possibilité de rendre les timbres inutilisés? C’est comme si on leur demandait de payer par avance les cotisations de nouveaux adhérents problématiques.

   Alors pourquoi ne pas se pencher résolument sur le problème et réaliser ce que réalisent déjà deux de nos rayons de Paris-Ville, le 8e et le 9e, la région de la Loire, et quelques organisations éparses à savoir : le paiement chaque mois de la quotepart des cotisations encaissées au cours du mois qui vient de s’écouler.

   Ajoutons que les versements mensuels se feront d’autant plus régulièrement qu’un contrôle sérieux sera organisé par l’établissement des feuilles de décompte à tous les échelons, ceux-ci avec cette méthode en comprenant l’importance.

   C’est une méthode d’administration que nous nous devons tous de réaliser rapidement.

   Que les camarades responsables qui n’ont pas encore compris, qui auraient besoin de plus d’explications n’hésitent pas, qu’ils nous écrivent et nous demandent tous les renseignements qu’ils désirent pour accomplir, en vrais communistes, la tâche que leur Parti leur a confiée.

   En avant !

   Pour une bonne administration !

   Pour une plus forte organisation !

   Pour la victoire des Soviets en France !

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