Interview avec le Camarade Basanta

Interview avec le Camarade Basanta

11-14 Mars 2010

   [Traduit par le Comité de Solidarité Franco-Népalais]

   Entre les 11 et 14 mars, les représentants du Parti des CARC [Parti des Comités pour Soutenir la Résistance – pour le Communisme (CARC) – Italie] étaient à Anvers pour une réunion concernant la révolution népalaise, où ils ont rencontré camarade Basanta du Comité Central du Parti Communiste du Népal Unifié (maoïste). Nous l’avons interviewé, et trouverez ci-dessous les réponses qu’il nous a donnés.

[…]

   Question.  Dans le numéro de décembre de notre journal Resistenza nous avons écrit que le CPNU(M) a lancé une campagne de mobilisation dans tout le pays contre le coup par les forces réactionnaires de refuser de se conformer aux accords au sujet de la fusion de la vieille armée royale  et l’Armée Populaire de libération. La campagne vise à 1, établir la suprématie du civil sur la puissance militaire, 2. défendre l’indépendance nationale, et 3. la réforme agraire. Cette campagne continue-t-elle toujours ? Quels développements et effets produit-elle ?

   Réponse. La grande Guerre Populaire que notre parti a lancée le 13 février 1996 visait à accomplir la Révolution de Nouvelle Démocratie, première phase pour ouvrir la voie au socialisme et au communisme mondial. Afin d’atteindre l’objectif stratégique minimum de Révolution de Nouvelle Démocratie au Népal nous avions appliqué diverses tactiques conformément à l’analyse concrète des conditions concrètes.

   Quand le monarque destitué Gyanendra a usurpé tout le pouvoir avec la force de l’armée réactionnaire, la contradiction politique entre les masses d’une part et le roi de l’autre est venue au premier rang. Objectivement, il a créé une situation dans laquelle les partis politiques qui se réclamaient démocratiques pouvaient être rassemblés dans un combat pour établir la république démocratique. Basé sur l’accord en 12 points, l’unité tactique entre les sept partis politiques et le nôtre était l’exécution correcte de la fermeté dans la stratégie et la flexibilité dans la tactique de notre part.

   L’abolition de la monarchie et l’établissement de la république démocratique dès la première réunion de l’Assemblée Constituante constitue un pas en avant important pour notre objectif stratégique minimum de Révolution de Nouvelle Démocratie, mais ce n’est pas la Révolution de Nouvelle Démocratie en elle-même.

   La Révolution de Nouvelle Démocratie a deux aspects : anti-féodal et anti-impérialiste. Avec l’abolition de la monarchie, l’institution féodale, le féodalisme, s’est affaibli politiquement mais n’a pas encore été supprimé. Et de l’autre, le programme agraire basé sur le principe de la terre à celui qui la travaille est loin d’être mis en œuvre. La bourgeoisie comprador bureaucratique est arrivée au premier plan du pouvoir réactionnaire. Ca signifie que la lutte populaire népalaise pour établir la démocratie, c.-à-d. la lutte pour rendre le peuple souverain et pour résoudre le problème agraire ainsi que pour établir l’indépendance nationale, n’est pas terminée.

   Nous devons comprendre que parfois la question de la démocratie vient au premier rang et parfois c’est celle de l’indépendance nationale. Mais maintenant, la suprématie civile et l’indépendance nationale ont été inséparablement liées ensemble et la lutte pour établir l’indépendance nationale est arrivée au premier rang. Par conséquent, la lutte pour la démocratie c.-à-d la suprématie civile sur le pouvoir d’État et la souveraineté nationale continuera tant que le peuple népalais opprimé ne sera débarrassé du féodalisme et de l’impérialisme, principalement l’expansionnisme indien dans notre cas.

   La lutte pour la suprématie civile et la souveraineté nationale que nous faisons maintenant entraîne les masses à la soutenir. En d’autres termes, cette lutte a réveillé la conscience sur la nécessité d’établir la souveraineté populaire dans le pouvoir d’État et l’indépendance nationale. Elle a préparé le terrain  pour l’offensive finale au cas où il y aurait obstruction dans l’établissement de la suprématie civile et de l’indépendance nationale au Népal.

   Q. Quelles sont les réactions des pays comme l’Inde, les Etats-Unis et la Chine qui ont essayé de décourager CPNU(m) et créer des problèmes et dommages à la population et le pays ?

   Réponse.
L’impérialisme ne veut jamais fournir aux classes opprimées le pouvoir politique, et ce dans n’importe quel pays.  Le Népal ne peut pas être une exception à cela.  En revanche, l’impérialisme a eu très peur de la force populaire grandissante vers la saisie du pouvoir par les classes opprimées népalaises sous la conduite de notre parti, le Parti Communiste Unifié du Népal (maoïste).

   L’expansionnisme indien sait que le premier pays qui sera le plus influencé par la victoire des maoïstes au Népal est l’Inde. Avec la victoire du peuple népalais, la classe dirigeante expansionniste indienne d’une part va perdre sa domination politique, économique et culturelle sur le Népal et de l’autre elle se rend également compte du fait que le succès de la Révolution de Nouvelle Démocratie au Népal va réveiller plus encore les masses indiennes contre les classes dirigeantes indiennes réactionnaires.  Par conséquent l’Inde est au premier rand contre notre lutte pour établir la suprématie civile et l’indépendance nationale au Népal.  Jusqu’à maintenant, la Chine avait maintenu sa politique de non-intervention dans les affaires politiques intérieures de notre pays.

   Q. Etablir une direction politique fermement et être capable de transformer l’ordre social du Népal : n’est-ce pas le cœur de la lutte pour mettre un terme au système féodal, au retard économique, à la misère et à l’analphabétisme, au système de caste, à l’oppression des femmes et des minorités nationales dans lesquelles le peuple népalais fut mis et tenu par la monarchie et les impérialistes ?

   A. Il n’y a aucun doute que tous les problèmes comme le retard économique, la misère, l’analphabétisme, le système de caste inhumain, la discrimination à l’égard des femmes et l’oppression nationale desquels le peuple népalais est jusqu’à maintenant accablé soient tous les résultats inévitables de l’état socio-économique semi-féodal et semi-colonial du Népal.  Ce n’est pas la fin d’un des seigneurs féodaux  mais la fin du système féodal et son interconnexion avec l’impérialisme qui provoquera une transformation révolutionnaire dans la société.

   Cependant, la fin de la monarchie est un pas en avant vers l’abolition du féodalisme et de l’impérialisme du sol népalais. À moins que le peuple népalais ne vainque le féodalisme et l’impérialisme et établisse de ce fait le Pouvoir de Nouvelle Démocratie, il n’y aura aucune transformation révolutionnaire de la société népalaise excepté quelques changements cosmétiques.

   Q. Quelles sont les étapes que le CPNU(M) pense devoir faire afin d’avancer le mouvement révolutionnaire pour gagner sur les ennemis internes et étrangers ?

   A. Chacun se rend compte que nous sommes maintenant dans l’assemblée constituante pour rédiger une nouvelle constitution qui ouvre la voie vers la résolution des contradictions fondamentales de la société. Cependant, les réactionnaires domestiques et étrangers conspirent à dissoudre l’assemblée constituante, à imposer le pouvoir présidentiel et à pousser le pays dans la guerre civile afin de maintenir le statu quo. Jusqu’au bout nous lutterons dur pour écrire la constitution populaire et pour établir la République populaire à partir de l’assemblée constituante mais nous ne les laisserons à aucun prix renverser le processus. Nous sommes disposés à les vaincre par l’insurrection populaire si les réactionnaires imposent la guerre civile injuste au peuple népalais.

   Q. La plupart des communistes italiens pensent que la révolution est quelque chose qui éclate. Nous pensons qu’elle est quelque chose qui doit être construite pas à pas. Que pensez-vous de ceci ?

   A. La révolution ne peut ni être développée par le con vouloir subjectif de quelqu’un ni provoquée spontanément par une crise révolutionnaire. Elle est le traitement correct de la dialectique entre la situation objective et la planification subjective de la part de l’avant-garde prolétarienne qui pousse vers l’avant le processus révolutionnaire.

   Q. Dans notre pays beaucoup de camarades sont limités par l’idée que nous sommes peu et, en outre, que nous sommes entourés par une masse réactionnaire et arriérée. Même une partie des ouvriers et des travailleurs suivent et soutiennent ouvertement les forces réactionnaires et racistes. Le CPNU(M) ne montre-t-il pas le contraire, par son action, qui est que les communistes peuvent gagner à la révolution toutes les classes ou au moins la plupart des classes des masses populaires (parce qu’en raison de leur position de classe, le socialisme est la seule, ou de toute façon meilleure, perspective de vie et de futur) ?

   A. Au début, il y a toujours un petit groupe d’activistes conscients qui lancent le processus révolutionnaire. L’idée que sans préparer une base de masse forte aucune lutte révolutionnaire ne peut être lancée est erronée. Ce n’est pas nous plus un processus qu’un groupe  minuscule d’activistes révolutionnaires engagés peut accomplir la révolution. C’est un processus qui se développe de petit à grand, du simple au complexe et du partiel à l’entier.

   Oui, l’expérience de notre parti l’a clarifié correctement. Au début de la guerre populaire, nous étions seulement 70 dirigeants et cadres engagés à plein temps dans notre parti. La conscience du peuple était très arriérée. Mais notre intervention consciente sur la situation a commencé à changer la situation d’une façon qualitative.

   La révolution se développe en spirale. Vraiment, si n’avions fait aucune intervention consciente sur la situation 15 ans avant, la situation actuelle ne serait pas arrivée.

   Q. Voulez vous envoyer un message à tous ceux qui, en Italie, sont impliqués dans la lutte pour « ne pas payer la crise des maîtres », et recherchent une sortie au désastre économique, politique et environnemental dans lequel la bourgeoisie (les maîtres, le Vatican, les riches et leurs autorités) nous ont plongé ?

   A. Objectivement, la situation devient favorable pour que les révolutionnaires fassent la révolution. L’effort conscient de changer cette situation est le besoin du jour. La crise économique, ces prochains jours, est sûre de mener à une crise politique dans l’ordre mondial impérialiste. Et le désastre politique et environnemental que la bourgeoisie ont provoqué une augmentation de la haine des masses laborieuses contre le système. Elle a certainement créé une base objective sur laquelle la révolution peut faire un pas en avant.