Interview sur la lutte de lignes au sein du Parti maoïste

Interview sur la lutte de lignes au sein du Parti maoïste

Gaurav

2011

   Question : Cela fait presque cinq mois que la sixième réunion élargie ou plénum du parti a eu lieu à Palungtar dans le district de Gorkha. Il a été largement estimé que les choses n’avancent pas vers la bonne direction. Aucun changement n’a eu lieu et aucun sens de nouveauté n’a été ressenti dans le parti. Seul le style de travail stéréotypé existe. Quel est votre avis à propos de cette situation?

   Réponse : Oui. Cinq mois se sont écoulés depuis que la Sixième réunion élargie du Comité Central du Parti Communiste Unifié du Népal (maoïste) se soit tenue à Palungtar dans le district de Gorkha. La polémique de haut niveau parmi près de sept mille cadres dirigeants a été un événement très important dans l’histoire de notre parti ainsi que dans l’histoire de tout le mouvement politique du Népal. Il y avait beaucoup de nouvelles choses à remarquer dans la réunion élargie. Un événement particulier est qu’aucun des trois documents, dont celui  du Président Camarade Prachanda que la presse se plaît à appeler «Supremo» du PCUN (m), n’a été adopté lors de la réunion historique. Toutefois, «il n’y a pas d’autre option que l’unité», «il n’y a pas d’autre option que la révolte populaire» et «il n’y a pas d’autre option que la transformation» avaient été convenus en tant que mots d’ordre de la réunion historique.

   La réunion du CC qui s’est tenue immédiatement après la rencontre historique a approuvé un plan d’action basé sur la ligne générale de la «révolte populaire ». Mais ce plan a été complètement abandonné et il n’y a pas eu de progrès dans la mise en œuvre de cette ligne. Il est vrai qu’aucun changement significatif n’a eu lieu, même après cela. Ca a provoqué un nouveau débat au sein du parti, sur qui était responsable de l’échec de cette ligne? Beaucoup sont d’avis que c’est le leadership principal qui est principalement responsable de l’échec de la mise en œuvre de ce plan d’action. Ca a été l’un des principaux points de débat lors de la réunion historique du CC de la dernière semaine d’avril.

   Question : Qui est responsable de cette inaction ? Qui pensez-vous être responsable de cela – le leadership principal ou toute l’équipe de direction ou les circonstances actuelles ?

   Réponse : Eh bien, cela a été l’une des questions la plus conflictuelle lors de la récente réunion du CC. Il y avait trois opinions différentes quant à la question de savoir quels facteurs et qui étaient responsables de l’échec de la mise en œuvre de cette ligne. Un, c’est la direction qui est principalement responsable. Deux, elle n’a pas été appliquée parce que la ligne générale de la révolte populaire était erronée et n’a donc pas été appliquée. Trois, c’était dû à l’absence de discipline dans le parti et aux activités de faction qui ont prévalu au sein du parti, ce qui était le principal facteur responsable.

   Question : Le parti a adopté la ligne politique de la révolte populaire. Mais les activités politiques de votre parti ne semblent pas être compatibles avec la ligne politique officielle du parti. La pertinence de la réunion de Palungtar a-t-elle maintenant pris fin ou est-ce seulement le résultat d’attitudes opportunistes et de compromis ?

   Réponse : Oui, « il n’y a pas d’alternative à la révolte populaire » était un mot d’ordre de la réunion de Palungtar. Et la réunion du CC qui a eu lieu immédiatement après la réunion élargie, a élaboré un plan d’action basé sur cette même ligne. Mais le même plan a été abandonné au nom de différentes excuses. Donc, la conclusion ne peut être établie que la ligne politique générale et que le plan d’action ne sont pas pertinents. Je crois toujours que la ligne politique adoptée par le plénum et que le plan d’action élaboré sur la base de cette même ligne sont corrects. Ce plan d’action et la ligne ont été délibérément sabotés en raison d’une tendance de la ligne.

   Question : Le parti a une montagne de problèmes et de défis en particulier dans le domaine idéologique, à propos de la ligne politique du parti et de son cadre organisationnel. Comment pouvez-vous croire que l’organisation de parti actuelle – organisation de parti de masse – puisse lancer avec succès la révolte populaire dans le but d’atteindre l’objectif de la Nouvelle Révolution Démocratique ?

   Réponse : C’est sûr, nous avons été confrontés à beaucoup de problèmes et de défis. Maintenant, la taille du parti est devenue très grande, mais la qualité a été considérablement réduite. Le parti du prolétariat avancé perd son caractère et semble devenir un parti de masse. Il est évident que si le caractère du parti n’est pas de retour sur la piste, si le parti n’est pas rectifié, il est tout simplement impossible pour ce parti de diriger la révolte populaire. Nous ne pouvons pas poursuivre le mouvement de rectification isolément de la lutte des classes. Donc, il n’y a pas de doute sur le fait que le parti doit être rectifié. Mais la façon dont le parti doit être rectifié doit être de mener la lutte de classe et une fois encore, il doit être testé dans la lutte des classes. Cela exige que les dirigeants doivent également passer le test. Passer un test une fois dans sa vie ne suffit pas. Même les dirigeants doivent passer le test encore et encore. Je suis convaincu que seul le parti maoïste est capable de diriger la Révolution de Nouvelle Démocratie, mais pas exactement dans la situation actuelle. Le parti doit se soumettre à un test, il doit entrer dans la fournaise de la lutte des classes en se basant sur la ligne idéologique et politique correctes et la bonne tactique et le plan d’action appropriés.

   Question : Vous, d’une part, parlez de Révolte Populaire alors qu’il y a une négociation marathonienne au sein du parti pour les postes et positions comme les ministères. Ne pensez-vous pas que c’est contradictoire?

   Réponse : Oui, de nombreuses tendances bourgeoises et égoïstes ont émergé au sein du parti à partir du plus haut niveau jusqu’au niveau le plus bas. Les gens, même au niveau central, montrent leur avidité pour les postes de ministre et autres postes de profit. Ce type de caractère qui se dessine et se développe lentement au sein du parti reflète le signe que le parti change de couleur. Ce changement affecte naturellement la ligne du parti, différentes déviations comme le centrisme et le droitisme, le réformisme sont apparues dans le parti et la lutte contre ces mauvaises tendances se développe. La lutte entre les deux lignes qui s’est clairement manifestée lors de la « Convention Nationale de Kharipati », de la « Sixième réunion élargie » et de la réunion du CC qui s’est conclue la semaine dernière, reflète la situation réelle du parti.

   Question : Les pays impérialistes et expansionnistes, en particulier l’expansionnisme indien, sont actifs pour créer des troubles politiques dans le pays. Les forces compradores et les laquais indiens incluant les partis Madhesi et certains groupes armés soutenus par l’Inde parlent d’un «front démocratique» au Népal. En plus de cela, le parti du Congrès Népalais et les laquais indiens au sein des partis de gauche font également écho aux paroles de l’Inde de manière collective. Ils jouent selon les règles indiennes. Face à cela, les forces progressistes et nationalistes au Népal sont confrontées à un défi de taille pour sauvegarder la souveraineté et l’indépendance nationale. Quel type de plan et de programmes avez-vous pour faire face à ce défi?

   Réponse : Ce que vous avez décrit sur le rôle de l’expansionnisme indien et le rôle de la bourgeoisie compradore et le capitalisme bureaucratique est fondamentalement correct. Cela a été pris en compte par le parti depuis assez longtemps. Par conséquent le parti a indiqué que la contradiction principale avait changé. La contradiction entre le capitalisme compradore et bureaucratique et les restes de féodalisme et l’expansionnisme indien est la contradiction principale. La politique de front uni a été modifiée en conséquence. La politique de base du parti est de forger le front uni entre les forces de gauche, les forces patriotiques et les forces démocratiques. Il a été reconnu que la lutte pour la souveraineté nationale et l’indépendance nationale est devenue la principale forme de lutte. Mais le problème majeur dans la mise en œuvre de cette ligne est la ligne erronée de penser spécifiquement au plus haut niveau de la direction du parti et de saboter le plan d’action pour appliquer la ligne. Les principales causes de l’émergence de la lutte entre les deux lignes sont l’ensemble de ces facteurs.

   Question : Comment pouvez-vous lutter contre ces forces réactionnaires sans unité forte au sein de votre parti ? En menant l’analyse à partir du point de vue révolutionnaire, vous exercez la ligne opportuniste et  préconisez l’éclectisme dans la pratique au nom de l’unité du parti. Amoindrir et minimiser la lutte entre les deux lignes dans le parti revient à éviter la lutte des classes. Etes-vous d’accord?

   Réponse : L’unité du Parti doit être vue de deux façons. Premièrement, le stade de la Guerre Populaire a atteint la phase finale où l’insurrection est décisive. Pour atteindre cet objectif nous devons avoir un parti fort et l’unité entre tous les communistes qui veulent la révolution est nécessaire. D’autre part, les opportunistes jugent également l’unité nécessaire pour placer les forces révolutionnaires en position minoritaire. Comme expliqué plus haut des signes d’opportunisme, dont l’éclectisme, ont été remarqués dans le parti et la lutte entre les deux lignes a été menée contre toutes les tendances erronées et a éclaté au plus haut niveau du parti. Nous ne minimisons pas la lutte de lignes qui s’est maintes fois reflétée dans la pratique. Il est vrai que l’unité forte dans le parti est la condition sine qua non pour la réussite de la révolution. Mais l’unité doit se fonder sur la ligne correcte ; c’est ce pour quoi les révolutionnaires au sein du parti se battent.

   Question : La révolution maoïste est en pleine expansion et en pleine accélération dans le monde entier. Mais le PCUN (maoïste) semble être un spectateur passif et muet de cette révolution. Que dites-vous au sujet des activités récentes du CCOMPOSA [Comité de Coordination des Partis et Organisations Maoïstes en Asie du Sud NdT] et du RIM [Mouvement Révolutionnaire Internationaliste NdT] ? Et quel rôle pour le PCUN (maoïste) à l’avenir?

   Réponse : Oui, le mouvement communiste est un mouvement internationaliste. En tant que parti le plus avancée du prolétariat, nous nous acquittions de notre devoir révolutionnaire en contribuant au mouvement communiste international. Ce que Lénine nous a appris est que la meilleure manière de servir le MCI est de faire la révolution dans son propre pays. Basé sur ce principe, nous jouions rôle très important au sein du RIM et aussi dans le CCOMPOSA. Mais quand le problème de ligne a émergé au sein de la direction du parti, notre rôle a été limité. Le rôle dirigeant de notre parti a été établi à l’époque de la GP, mais malheureusement en ce moment même des révolutionnaires communistes regardent notre parti avec suspicion, se demandant si ce parti peut changer de couleur et devenir le véhicule du réformisme. Dans cette situation, il est très difficile pour le parti de jouer un rôle dirigeant et substantiel. Un point important est que les maoïstes du monde regardent avec attention la lutte entre les deux lignes du parti. Si cette lutte de lignes n’avait pas vu le jour, les maoïstes du monde auraient rompu les liens avec notre parti et les relations fraternelles auraient été brisées. Ils placent leurs espoirs dans le résultat de la lutte entre les deux lignes. Nous continuons d’espérer que nous serons en mesure de revitaliser le RIM et le CCOMPOSA et que nous renforcerons notre rôle.

   Question : Pouvez-vous élaborer davantage sur la Révolution maoïste népalaise ? Et aussi quelque chose sur The Next Front ?

   Réponse : Eh bien, notre parti est maintenant confronté à deux problèmes différents : les problèmes de la lutte interne et les problèmes de la lutte des classes. Il est largement admis que si le parti était sincèrement unifié autour de la ligne correcte, la « révolte populaire » aurait déjà réussi. Mais les lignes incorrectes au niveau du leadership ont saboté cette occasion en or. Notre parti est le parti des héros qui ont versé leur sang et tout sacrifié pour la révolution. Cette qualité du parti prédomine toujours à différents niveaux. Nous espérons que la ligne révolutionnaire triomphera et que le parti sera en mesure de mener la révolution. Par conséquent, je vois un avenir radieux de la révolution népalaise.

   The Next Front me semble comme une nouvelle initiative visant à propager la ligne révolutionnaire et les activités révolutionnaires à l’échelle internationale. Ainsi, c’est appréciable et sollicite le soutien des révolutionnaires maoïstes. Merci !