La question des races « supérieures et inférieures »

Les Cahiers de Contre-Enseignement Prolétarien

#21 – Qu’est-ce qu’un aryen ?

La question des races « supérieures et inférieures »

   Il est probable que les gens qui abusent du mot « race » le citent à l’appui de leurs préjugés, sans se préoccuper de chercher la vérité. Les préjugés de race et la haine de race sont entretenus et même grossis par de vagues bavardages sur la « supériorité naturelle » d’une race sur l’autre. Ainsi, quand des membres des diverses races blanches traitent les races d’Asie et d’Afrique avec une cruauté persistante et calculée (parce qu’ils tirent profit de cette cruauté), ils donnent souvent comme excuse leur hypothétique supériorité raciale. Ils disent ouvertement et cyniquement que les peuples plus arriérés doivent se résigner à la domination écrasante de leurs «supérieurs». Ils justifient même la terreur sanglante et les massacres en disant qu’ils sont nécessaires pour retenir les races inférieures dans une obéissance nécessaire. Les pogroms des Juifs ont été justifiés de la même manière. Toute cette question est d’une grande importance et doit être discutée impartialement.

   Une analyse claire et sans passion de la question des races supérieures et inférieures a été faite par Franz Boas dans son livre The Mind of primitive man((L’intelligence de l’homme primitif.)). Bien que ce livre ait été écrit en 1911, il est encore aussi actuel que s’il était d’hier. Nous ne pouvons faire mieux que de citer ici cette grande autorité en anthropologie.

   On croit parfois que certaines races humaines sont physiquement plus proches des animaux que d’autres, et sont situées, par conséquent, aux degrés inférieurs de l’échelle humaine. Certaines personnes parlent de l’aspect bestial et même de la mentalité animale de certaines races parce qu’elles ont les lèvres ou le front d’une certaine forme. En réalité, dit Boas.

   « Il faut se mettre en tête que les races que nous sommes habitués à appeler « races supérieures », ne se trouvent nullement, sous tous les rapports, le plus éloignées de l’animal. L’Européen et le Mongol ont les plus grands cerveaux. L’Européen a un petit visage et un grand nez – tous traits plus éloignés de l’aïeul probable de l’homme que les traits correspondant  d’autres races. D’autre part, l’Européen partage avec l’Australien des caractéristiques inférieures, tous deux retenant à un haut degré le caractère velu de l’aïeul animal, tandis que le développement spécifiquement humain de la lèvre rouge est développé de la manière la plus marquée chez le Nègre. Les proportions des membres du Nègre sont également plus distinctes des proportions correspondantes dans les singes supérieurs que ne sont celles de l’Européen. »

   Il est évident, alors, que pas une partie de la famille humaine ne peut se vanter d’être la plus éloignée des animaux inférieurs. Les uns en sont les plus éloignés sous un rapport, les autres sous un autre. Le poids le plus élevé du cerveau trouvé dans les races blanches et qu’on oppose aux autres, constitue assurément une différence importante avec les animaux inférieurs. Sous ce rapport, les hommes blancs se trouvent les plus éloignés des singes. Mais quelques membres de la race blanche, hautement doués, ont eu de très petits cerveaux. La forme et les circonvolutions d’un cerveau sont beaucoup plus importantes que son volume. Bien que le poids moyen du cerveau des Blancs soit plus élevé que celui des races de couleur, cela ne veut pas dire qu’il y ait une vraie différence de capacité naturelle entre les individus moyens des diverses races.

   Nous supposons trop souvent que si une tribu donnée n’a pas une culture développée comme la nôtre, elle est incapable de s’assimiler une telle culture venant du dehors. Autrement dit, nous confondons l’accomplissement avec la capacité d’accomplir. C’est là une profonde erreur. Les Nordiques de l’ancienne Europe restèrent barbares et relativement peu civilisés pendant des milliers d’années, mais, quand ils vinrent en contact avec la haute culture méditerranéenne, ils se développèrent rapidement. Tout ce dont ils avaient besoin était le stimulant extérieur.

   De la même façon, les tribus arriérées de l’Asie et de l’Afrique d’aujourd’hui sont capables de développement rapide quand elles commencent à s’assimiler les meilleures formes de la culture occidentale. (Non pas, cependant, quand les seuls dons de cette culture supérieure sont le whisky et les obus.) Citons Boas encore une fois :

   Nous ne sommes pas enclins à considérer la constitution mentale des différentes races humaines comme différant dans ses points fondamentaux. Bien que la répartition des facultés parmi les races humaines soit loin d’être connue, nous pouvons dire ceci : la faculté moyenne de la race blanche se retrouve au même degré dans les individus de toutes les autres races, et bien qu’il soit probable que certaines de ces races ne puissent pas produire une proportion aussi considérable de grands hommes que notre propre race, il n’y a pas de raison pour supposer qu’ils ne sont pas capables de parvenir au niveau de civilisation représenté par la masse de notre propre race.

   Nous n’avons fait que commencer l’étude de ces matières. Après des années d’étude, il se peut que nous arrivions à une conclusion rationnelle concernant les différents talents des différentes races humaines. Mais nous ne pouvons le faire que si nous nous libérons complètement de tout préjugé. Les études faites jusqu’à présent montrent combien les préjugés les plus répandus sont peu fondés.

   Par exemple, des individus appartenant aux races que l’on prétend arriérées ont souvent été accusés d’infériorité mentale, par suite d’attention distraite, d’inconstance et d’incapacité de se concentrer. Les voyageurs qui font ces rapports sont toujours convaincus de leur supériorité mentale. Mais, comme Boas l’indique, leur observation est erronée. Parce qu’ils ne peuvent pas comprendre le point de vue de l’indigène, ils lui parlent de choses qui lui paraissent ennuyeuses, stupides, et hors de propos. Naturellement, l’attention de l’indigène s’égare; pour lui, la conversation est puérilement insignifiante. Mais quand un anthropologue entraîné commence à lui parler de quelque chose qui l’intéresse, alors c’est souvent l’indigène qui montre le plus de zèle, de concentration et de patience dans l’entretien qui s’ensuit. Les Européens et les indigènes ont les mêmes dons, mais ils les manifestent dans des situations différentes. Les prétendus hommes primitifs font souvent preuve d’une retenue, d’une abnégation, d’une concentration et d’une patience extrêmes, par exemple, dans les cérémonies (souvent douloureuses et prolongées) par lesquelles un jeune homme est « initié » dans une tribu. Les Européens manifestent les mêmes vertus dans des situations différentes. Mais les vertus sont les mêmes, et existent également dans les deux races.

   La seule étude de valeur sur les races et leurs différents dons est celle faite par un savant exempt de préjugés sur la question de «supériorité» et «d’infériorité». Il n’y a presque aucune preuve scientifique pour appuyer les prétentions établies journellement par telle ou telle branche de la famille des races blanches quant à la suprématie en talent et en capacité. Lorsqu’on a de telles prétentions, elles sont généralement le résultat de préjugés. Il faut toujours s’en méfier, et l’on constatera alors qu’elles sont généralement inexistantes. Et, cependant, ces prétentions sont souvent présentées de façon très scientifique. Même des savants qui ont réalisé une œuvre intéressante dans leur propre spécialité se sont laissés aller à écrire de façon ridicule sur la question des races et de la supériorité raciale.

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